«La plupart des gens qui viennent au cours sont attirés par le sado-masochisme» Michael Ronsky, artiste et professeur de bondage japonais
Lacer, nouer, brider des cordes pour entraver le corps. Les poignets et les chevilles immobiles, parfois le buste bien confiné dans un corset, les yeux bandés et le bruit d’un fouet qui claque. Oui, il s’agit bien du bondage, une pratique dérivée du sado-masochisme (SM). Elle consiste à attacher son partenaire dans le cadre d’une relation érotique.
En 2014, elle est devenue tendance et s’affiche partout dans l’austère ville calviniste. Au rayon lingerie des grands magasins, les fouets côtoient les menottes. Sur les scènes cul...turelles de Genève et Lausanne ou dans les pages des magazines, le bondage domine. A l’origine du phénomène, le best seller érotique Cinquante nuances de Grey de E. L. James.
Bondage amateur
«Depuis le succès de cet ouvrage, on a vu une très nette hausse des nos ventes d’objets SM amateurs», explique Jan Brennimann, responsable des magasins Magic X en Suisse. Une foule de nouveaux clients curieux et désireux de mettre du piment dans leur vie sexuelle, franchissent le pas et entrent parfois pour la première fois dans ces magasins spécialisés. «Dans la gamme des objets SM qui se vendent le mieux, on trouve les fouets, les menottes et les cordes», précise le responsable.
Des gadgets que l’on découvre aussi au rayon lingerie de grands centres commerciaux de Suisse romande. A côté des classiques culottes en coton, on voit désormais des collections explicitement inspirées du bondage. «J’aime bien cette nouvelle diversité de l’offre! s’exclame une cliente quinquagénaire. Cela ne me choque pas et ça me donne des idées pour les Fêtes.»
A l’approche de Noël, les marques les plus prestigieuses mettent le paquet. Aubade ou encore Agent Provocateur proposent des coffrets aux noms qui excitent le fantasme comme La pièce maîtresse. A l’intérieur de ces luxueux écrins, des chaînes, des menottes, du scandale.
Mise en scène érotique
Si l’industrie de la mode s’est accaparé le phénomène, c’est parce le bondage possède une véritable esthétique dont l’origine est un art japonais: le Shibari.
Le principe? Encorder, suspendre et mettre sous tension un corps. Les nœuds sont minutieusement réalisés et l’entrelacement des gestes est précis.
Au Palais Mascotte à Genève, on s’est emparé de la tendance. «Nous organisons une soirée Shibari un vendredi par mois et le succès est immense», explique Antoine Mathys, le programmateur. Au Zinéma à Lausanne, des soirées similaires ont eu lieu et, comme à Genève, la mise en scène est signée Michael Ronsky.
Cours de bondage
Depuis plusieurs années, cet artiste pratique et enseigne le bondage à la japonaise. «Le public est très divers, explique Michael Ronsky. Les gens d’âges et de milieux sociaux différents se mélangent.» Si la performance se veut purement artistique, elle possède néanmoins des liens évidents avec la sexualité.
«J’organise aussi des cours de Shibari et la plupart des élèves sont à l’origine, attirés par le sado-masochisme. Chez les plus jeunes et dans le milieu artistique-branché, le bondage est devenu très tendance», constate l’artiste. L’esthétique singulière du bondage et sa mise en scène érotique cultivent le fantasme.
Mais il ne faut pas s’y tromper pour autant. Pour l’attacheur, «si le bondage nourrit l’imagination du public, il n’en fait pas nécessairement des adeptes du sado-masochisme.»