La réforme du 2e pilier bouscule les Lausannois

2e PILIER • Alors que le Conseil Fédéral réfléchit à l’interdiction de l’utilisation du 2e pilier pour acheter un logement, de futurs propriétaires lausannois veulent désormais accélérer leur procédure d’achat.

  • L'accession à la propriété, bientôt un rêve pour les classes moyennes lausannoises? DR

    L'accession à la propriété, bientôt un rêve pour les classes moyennes lausannoises? DR

Chaque année, plus de 25’000 Suisses réalisent un achat immobilier en utilisant leur deuxième pilier. Une pratique devenue non seulement courante mais souvent rendue indispensable par l’envolée des prix de l’immobilier dans les villes.

«Pour la grande majorité de mes clients, il est déjà difficile de financer leur achat d’appartement ou de maison. Sans le deuxième pilier, la question ne se posera simplement pas. Ils resteront locataires», explique Pascal Beauvais, coach immobilier pour les acheteurs romands.

Et, il est catégorique, de nombreux clients inquiets l’ont contacté ces derniers jours pour lui demander de finaliser l’achat de leur maison avant l’automne. Une augmentation des achats bienvenue d’ailleurs d’un point de vue statistique et économique puisque le volume de transaction immobilière était en légère baisse ce début d’année 2014.

Alors le Conseil Fédéral utilise-t-il cette annonce dans ce but, ou réfléchit-il réellement à une solution pour diminuer le versement des prestations complémentaires ? Pour rappel, ces dernières permettent à une personne retraitée de vivre décemment malgré que son deuxième pilier soit insuffisant ou dilapidé.

Acharnement?

Depuis l’été 2012, les règles du financement immobilier ont déjà bien été modifiées par l’introduction d’un niveau minimal des fonds propres à détenir par les preneurs de crédit. Une mesure très contestée parmi les professionnels du secteur qui peinent de plus en plus à vendre leurs biens à la classe moyenne helvétique.

Le promoteur immobilier Roland Morisod y voit même un acharnement de l’Etat sur les futurs petits propriétaires: «Je vois que la demande de location augmente au fur et à mesure que l’Etat restreint l’accession à la propriété. C’est d’autant plus incompréhensible qu’on a parfois l’impression que les partis de gauche travaillent pour nous, propriétaires loueurs.»

Autre effet collatéral de ces restrictions, la recherche de solutions de financement qui contournent les normes légales. «Nous devrons bientôt peut-être, lors d’une vente de PPE, proposer de prêter à l’acheteur une partie de la somme qui alimentera ses fonds propres. C’est ça ou la vente ne pourra simplement pas se réaliser. Il y aura donc une dimension sociale et commerciale dans ce remplacement des banques et du 2e pilier par les promoteurs», confie Roland Morisod.

Effets incertains

Suite à l’annonce du Conseil Fédéral, une grande majorité des politiciens suisses se sont déclarés contre l’interdiction totale des financements immobiliers avec le deuxième pilier. Alors qu’à gauche on estime qu’il faut réfléchir à une solution plus mesurée pour protéger les revenus des retraités, à droite on s’élève en bloc contre toute restriction.

«Ces prochains mois seront troublés et les acheteurs ne doivent pas paniquer et omettre de négocier les prix, surtout dans la région lausannoise où ils sont globalement élevés», rappelle le coach immobilier Pascal Beauvais.

Il faudra de toutes façons attendre la fin de cette année pour savoir si ces inquiétudes étaient fondées. On saura alors si les acheteurs pressés ont profité de leur dernière chance de devenir propriétaire ou si les vendeurs ont bénéficié de cette petite tempête pour faire de très bonnes affaires.