«Un 5 pièces jusqu’ à 7500 frs»
«Ça fait plusieurs années que la ville nous harcèle, mais là j’ai appelé mon avocate pour qu’elle se charge des procédures. Je suis dans mon bon droit», scande une petite propriétaire irritée, au téléphone.
Elle fait partie des bailleurs contactés par la Ville afin de leur signaler qu’ils devaient redemander une autorisation de location pour leurs logements meublés. Ces derniers, souvent destinés à accueillir des expatriés durant une période relativement brève, affichent des loyers par exemple supérieurs à 3’600 francs pour un trois pièces ou 2’500 francs pour un studio d’une pièce.
Le problème de cette propriétaire de dix appartements? Même si cela fait 30 ans qu’elle exerce son activité, il est fort probable que cette nouvelle autorisation demandée lui soit refusée. C’est en effet ce qu’annonçait récemment le Municipal Gégoire Junod afin de «mettre de l’ordre» dans un marché de la sous-location de meublés qui abuserait trop souvent sur les prix.
Les preneurs existent
Ce à quoi les régies répondent en chœur avec Frank Delaloye de Loris Group: «Si nos logements luxueusement meublés trouvent si facilement preneurs, c’est que les prix sont simplement adaptés au marché.» Loris Group, l’un des leaders du marché des meublés, assure d’ailleurs respecter scrupuleusement le droit du bail en majorant de 20% seulement le loyer lors de la sous-location meublée.
Un pourcentage qui se cumule toutefois souvent avec une rénovation réalisée par le propriétaire et donc également répercutée sur le loyer.
Alors qu’un Lausannois devra, en moyenne, chercher un appartement durant 6 mois avant de signer un bail, il est essentiel qu’un directeur étranger qui viendrait, par exemple, prendre en urgence des fonctions dans une entreprise suisse, puisse trouver des solutions de logements.
Il sera prêt, par contre, à débourser une somme plus élevée que la moyenne fixée par le marché de la ville qui l’accueille. C’est sur ce fonctionnement que la plupart des régies spécialisées ont pu augmenter leurs prix parfois jusqu’à l’obscène. «A l’époque, nous pouvions louer des 5 pièces pour 7’500 francs à certains professeurs ou étudiants. Mais aujourd’hui, le marché est beaucoup plus raisonnable», confesse Frank Delaloye.
Besoin réel
Avec le recrutement international toujours en hausse des multinationales, de l’EPFL ou du CHUV, les besoins de logements confortables et meublés pour de courtes périodes sont évidents. D’ailleurs, il n’est pas question pour Grégoire Junod de réduire cette offre, mais davantage de la responsabiliser. «Les sociétés se réjouiraient certainement de payer moins cher», résume-t-il. Pas sûr dès lors que ces logements, même une fois le prix réduit, retournent dans le marché traditionnel de la location.
Quoi qu’il en soit, selon les professionnels de la branche, cette mesure n’aura pas d’effet massif sur les prix globaux de l’immobilier lausannois. Tout au plus, elle empêchera certains profiteurs d’abuser du très fort pouvoir d’achat d’expatriés ou de richissimes sociétés internationales et mettra la lumière sur le travail du Municipal Junod. A l’heure actuelle, la ville a mis la pression sur différentes régies de la place qui ont ensuite fait recours devant les tribunaux. La procédure promet d’être longue et, en attendant, les loyers élevés ont de beaux jours devant eux. Cela dit, l’exemple d’un Français condamné par un tribunal genevois à 15 mois de prison avec sursis pour usure, pourrait bien inquiéter le secteur. Son crime? Avoir sous-loué des studios en les majorant d’environ 50%, soit beaucoup moins que certains bailleurs lausannois.