Y a-t-il overdose de restaurants à Lausanne?

- Chaque semaine ou presque, un nouvel établissement ouvre ses portes à Lausanne.

- Parrallèlement, les habitudes de consommation ont évolué et la clientèle est moins fidèle.

- A la peine, les restaurants traditionnels tire la sonnette d'alarme.

«Je pense qu’il y a environ 20% d’établissements en trop!»

Un samedi soir comme les autres au centre-ville de Lausanne. Depuis quelques mois, le constat est toujours le même. Si certains restaurants à la mode font le plein et doivent refuser du monde, à quelques mètres de là, les établissements traditionnels sont presque vides.

Au grand désespoir de Christian Suter, le patron du Café Romand à Saint-François: «Ma frustration est grande, car nous sommes tous les uns sur les autres, on donne des licences à tout-va. Il y a beaucoup trop d’amateurs qui ouvrent leur bistrot. Et puis les clients sont plus volatiles aussi. En l’espace de cinq ans, j’ai presque perdu un tiers de mon chiffre d’affaires, il faut absolument revenir à une clause du besoin, sinon on devra fermer.»

Conjoncture et tendances

La volatilité d’une clientèle sensible aux nouvelles tendances gastronomiques n’est en outre pas le seul motif d’inquiétude chez les restaurateurs. Il y a aussi un évident phénomène conjoncturel dont il faut tenir compte. En 2015, les Suisses ont moins dépensé pour manger et boire hors de leurfoyer. Et par rapport à l’année précédente, cette baisse s’élève à 1,1%. Plus inquiétant encore, la dernière étude de la Commission Conjoncture vaudoise indiquait cet été que 55% des restaurants du canton souffrent d’une baisse de leur chiffre d’affaires sur un an, un chiffre loin d’être négligeable.

Sans être alarmiste, Gilles Meystre, président de GastroVaud, confirme lui aussi son inquiétude: «Les restaurants lausannois sont à l’image des autres commerces de la ville, cela ne va pas très bien. Je pense qu’il y a environ 20% d’établissement en trop, et surtout beaucoup d’amateurs qui s’improvisent restaurateurs après avoir vu des émissions culinaires.»

Une position qui étonne Helena Druey, City Manager: «Chaque restaurateur a le droit de tenter sa chance s’il fait bien son travail, je ne trouve pas pour ma part qu’il y a trop d’établissements à Lausanne. Au contraire, c’est bien que des personnes se lancent dans l’entrepreneuriat et il faut inciter ce type de démarches car cela contribue au dynamisme d’une ville.»

Les recettes du succès

Dans ce contexte difficile, nombreux sont les restaurateurs conscients qu’ils se doivent de redoubler d’efforts et d’être encore meilleurs qu’avant. Cela passe bien sûr par la qualité des plats servis, un service chaleureux, mais aussi un concept fort. On peut rappeler à ce propos, les succès de la brasserie de Montbenon, de l’Eligo ou encore de l’Étoile Blanche.

Également au rayon des réussites, le Suku, qui démontre qu’avec un chef expérimenté et une carte courte, il est encore possible de tirer son épingle du jeu. Ouvert il y a six mois, l’établissement a pour ambition de proposer une cuisine indienne élégante.

«C’est un métier de passion car on ne devient pas riche avec un seul restaurant! Et le marché est difficile, puisque deux enseignes au moins, ferment chaque jour dans le canton de Vaud, tient à rappeller l’un des trois associés de l’établissement, Marc Wendenburg, qui rappelle: si nous avons du succès, c’est que nous nous appuyons sur notre chef qui a une riche expérience. Notre ambition dest d’essayer de changer la réputation souvent peu fameuse de la gastronomie indienne.»

Malgré les difficultés, il est donc encore possible à Lausanne, c’est une évidence, de remplir la salle de son établissement. Certains y parviennent quotidiennement, les autres feraient bien de s’inspirer de ces réussites en misant sur l’originalité et la qualité. Deux atouts qui font toujours recette…

Gilles Meystre, Président de GastroVaud

La guerre des pizzerias est déclarée

La Nonna, Da Carlo, Chez Mario, Pz Pizza, Bella Vita, Le Milan, la liste des restaurants italiens était déjà longue. Depuis quelques semaines, un nouvel acteur de taille est venu s’installer dans les locaux de l’ancien cinéma Atlantic fermé en 2011. En effet, la Luigia n’a pas fait les choses à moitié: 170 places à l’intérieur et 56 en terrasse. Après ses succès à Genève et à Nyon, l’enseigne compte bien se tailler la part du lion au cœur de la capitale vaudoise. Pour Marco(*), patron d’une pizzeria en centre-ville, la situation n’a jamais été aussi critique: «C’est très simple, il y a une guerre ouverte entre les différents restaurants italiens. C’est devenu infernal, car tout le monde se tire dans les pattes. Pour survivre, nous sommes obligés de jouer avec la loi en ne déclarant pas forcément tous nos revenus, nous n’avons plus le choix!»

(*) nom connu de la rédaction