Sur nos Ormonts, quand le soleil annonce… un brillant passé

GÉNÉALOGIE• Depuis trente ans, un Vaudois travaille inlassablement sur la généalogie de sa famille, les Borloz, originaires de la Vallée des Ormonts. Un minutieux travail de détective qui lui a permis de remonter jusqu’au… XVe siècle.

  • Trente ans de travail pour redonner vie à une histoire de famille multiséculaire. (Photo SANTISO)

Dans la vallée des Ormonts, dans le district d’Aigle, les Borloz sont une institution, tant ils y sont enracinés de longue date. Mais qui sont-ils vraiment? Où vivent-ils et d’où viennent-ils? C’est pour répondre à ces questions que Jean Borloz, établi à Lausanne, s’est lancé il y a près de trente ans dans une incroyable et trépidante enquête généalogique.

Nous sommes en 1996 et c’est au cours d’une fête de famille  que l’idée a germé: «120 personnes étaient présentes et c’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que je ne savais pas grand-chose de mon histoire familiale et pour cause: les archives communales d’Ormont-Dessous avaient brûlé en 1866. Tout comme mes ancêtres qui chassaient le chamois, je décidai alors de débusquer des Borloz dans les coins les plus reculés de la planète!». 

Ténacité

Sauf que l’homme, qui fait une longue carrière dans la haute administration communale, est un tenace. Sa devise, en bon historien de formation, il la tient de… Richelieu: «La ténacité est la volonté inspirée par la raison; l’obstination est la volonté qu’aucune raison n’éclaire».

Alors, il se lance, consacre tout son temps libre, et plus encore quand il arrive à l’âge de la retraite, à cette longue recherche en forme de quête interminable. Un travail de fourmi, de bénédictin et bien sûr de détective, pour celui qui aurait pu «dans une autre vie, être enquêteur de police judiciaire ou de police scientifique».

Les qualités requises par ces professions, aujourd’hui largement médiatisées par la fiction, notre homme les a incontestablement. Ténacité donc, mais aussi force de travail et patience, doublées d’un inextinguible goût de comprendre et de trouver. Alors, en s’aidant de registres paroissiaux, de testaments, de faire-part de décès, d’articles de presse mais aussi d’internet et des innombrables bases de données que le web recèle, il cherche inlassablement, encore et toujours, traque les naissances et les décès, débusque les homonymes et identifie peu à peu les différentes branches d’une famille aux ramifications tentaculaires dont l’origine, attestée, remonte à… 1496.

Parfois il trouve, parfois non, mais qu’importe: il enfouit le «chaînon manquant» quelque part dans un coin de sa mémoire, jusqu’à le déterrer des années plus tard, lorsqu’une opportunité d’élucidation se présente.   Une anecdote est emblématique de cet incroyable travail: un jour, il entend parler d’un Borloz qui serait mort à Pearl Harbor en 1941. A force de recherches, de recoupements et de sollicitations, il finit par recevoir, envoyée par une agence gouvernementale américaine, une photographie de la tombe du malheureux, enterré aux Philippines, après avoir survécu près de sept mois dans un camp de prisonniers japonais. Poussant l’investigation encore plus loin, il découvre ensuite que cet homme est issu d’une branche de la famille Borloz qui avait émigré vers 1880 en… Egypte.

Au fil des décennies, il répertorie plusieurs milliers de personnes pour, in fine, restituer aux Borloz la mémoire d’un passé lointain mettant en lumière les parcours de ceux qui ont émaillé l’histoire familiale, des héros, des bad boys, des paysans, des artistes, des militaires, des politiciens et tant d’autres.  Au final, c’est une saga familiale couvrant une vingtaine de générations qui est racontée avec une précision méticuleuse et un humour tout en retenue, dans une passionnante pérégrination généalogique de plusieurs centaines de pages, dont un exemplaire sera d’ailleurs déposé aux Archives cantonales vaudoises.

Saga familiale, saga vaudoise

Une saga familiale, une histoire vaudoise bien sûr, mais aussi une histoire mondiale tant de nombreux Borloz ont quitté la Suisse pour les sirènes d’un ailleurs plus flamboyant.  «Ce travail a été une occasion de créer des liens inimaginables sans cela, mais c’est aussi une manière de transcender la mort et de laisser derrière soi quelque chose de dense, structuré et documenté à tous ceux qui portent le même patronyme que moi», conclut cet homme pudique qui, histoire d’aller jusqu’au bout de sa passion, s’est même adonné à des explorations génétiques via des tests ADN. Qui sait, cela donnera peut-être envie à quelqu’un d’autre de poursuivre cette aventure?»