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ALIMENTATION • Des plats vegan doivent-ils être servis quotidiennement dans les prisons et les hôpitaux suisses? Deux activistes l’affirment. Déboutés par les tribunaux helvétiques, ils ont saisi la Cour européenne de des droits de l’homme.

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«Bonjour! Pour vous aujourd’hui, ce sera cuisine exclusivement bio, sans gluten, végétarienne ou vegan?» Quand on va au bistro, la question ne se pose pas vraiment. L’endroit qu’on choisit correspond - normalement - à ce qu’on aime ou à ce qu’on a envie de découvrir: ici, une bonne fondue, là un bon filet de bœuf, des fruits de mer ou alors on se précipite dans un lieu réputé pour ses plats qui bannissent toutes viandes et poissons, voire plus...

Violation de la liberté de conscience?

Mais qu’en est-il dans des lieux publics moins conventionnels comme les prisons ou les hôpitaux?

Fin octobre, à Genève, un détenu helvétique, militant suisse des droits des animaux, s'est plaint de ne pas avoir reçu une alimentation vegane adéquate en prison, malgré des demandes répétées. Il a saisi les tribunaux, sans succès, puis a finalement porté plainte contre la Suisse devant la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) à Strasbourg qui doit examiner si la prison genevoise a violé le «droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion».

Exemple britannique

Récemment, c’est un patient hospitalisé à Cery, qui dépend du CHUV, qui en fait de même. En y arrivant, ce militant de la cause animale annonce qu’il est vegan. Pourtant, à une quinzaine de reprises pendant son séjour, il relève qu’on lui sert un plateau-repas végétarien qui comprend des œufs et du lait de vache, ou alors du riz et des brocolis, assiette certes vegane, mais pas suffisamment équilibrée selon lui. Verdict de sa part: c’est une violation du droit fondamental à la liberté de conscience. Il s’est joint à la plainte déposée à Strasbourg.

Problème anecdotique? Caprice exagéré qui pourrait être sans fin comme le décrit avec beaucoup d’humour et d’ironie Alan Monoc dans sa chronique ci-dessous? Ou choix moral que toute société civilisée se doit de respecter?

Chacun aura bien évidemment un avis à ce sujet. Reste qu’il y a peu un tribunal britannique a jugé que le véganisme constituait une «croyance philosophique» et devait être protégé par la législation contre les discriminations. Ce qui n’est pas le cas en Suisse où les végétaliens sont une infime minorité, dont les rangs grossissent toutefois au fil des ans.

Enjeu important

Dans ce contexte, la décision que prendra la Cour européenne est donc loin d’être anecdotique. Elle pourrait suivre l’exemple anglais et faire jurisprudence, avec des conséquences importantes sur l’approvisionnement en nourriture dans les prisons et les hôpitaux des 46 Etats membres du Conseil de l’Europe, dont la Suisse. Au-delà de tout sarcasme, l’enjeu est donc de taille!