Créer sans gaspiller: de l’art écologique et ludique

ART LOCAL • Dans son atelier situé à Puidoux, Bertrand Cazenave s’adonne à la création de sculptures lumineuses faites de verre et de matériaux récupérés. Il est l’un des rares artisans du lustre encore actif.

  • L’artiste au milieu des lustres et de ses propres créations dans son atelier de Puidoux. MISSON-TILLE

    L’artiste au milieu des lustres et de ses propres créations dans son atelier de Puidoux. MISSON-TILLE

Verre de Murano, cristal de Bohème, Swarovski, mais aussi ampoules, tessons de bouteilles, tous les morceaux de verre intéressent Bertrand Cazenave, qui les récupèrent quelles que soient leurs formes, couleurs, ou fonction précédente. Depuis deux ans, quantité de matériel et de verre accumulée chez cet expert en restauration de lustres trouve une seconde vie passionnante dans ses multiples créations lumineuses. Ces dernières sont, de son propre aveu, «enfantines et ludiques, kitsch et colorées». Elles représentent souvent des personnages, composés de têtes, de bras, et souvent même d’attributs sexuels. Ce qui lui importe par-dessus tout, lorsqu’il crée, c’est la lumière. «Je prends la lampe de poche, et j’observe le résultat lorsque l’objet est éclairé.» Sa seule exigence: que la matière récupérée l’inspire. Cela peut aussi être du bois, du métal, ou des restes de vaisselle.

Engouement public

Le concept plaît puisque cAZenave – son nom de créateur – enchaîne les expos en Suisse et en France. Actuellement, ses créations sont visibles à Nice jusqu’à la fin de l’année. De plus, elles ont été exposées le 10 septembre lors d’une conférence sur le développement durable organisée par Green Peace et le 30 septembre lors d’un événement consacré à l’économie circulaire pour l’ouverture de Beaulieu Circulaire, le nouvel espace de l’Impact Hub Lausanne. «Je suis sur un petit nuage», avoue-t-il avec candeur, en constatant l’engouement du public pour ses créations.

Notion de recyclage

La pandémie ayant fortement limité les événements publics, l’intérêt pour les sculptures de cAZenave prend aujourd’hui l’ascenseur. L’artiste a commencé à assembler ses créations durant le confinement en 2020, «dans un esprit ludique, sans forcément penser à l’aspect écologique de la démarche. La notion de recyclage est venue ensuite.» Mais l’artiste ne se considère pas pour autant militant: «Pour cela, je considère qu’il faut être irréprochable, or je ne le suis pas. Je me déplace en voiture et je vais parfois aussi au plus vite ou au plus simple, sans penser toujours à l’environnement. Mais je n’aime pas gaspiller ni jeter. Me servir de choses anciennes pour en créer de nouvelles, cela me plaît. J’aime l’idée que, par mon intervention, un objet inutile, que l’on ne regarde pas, devienne autre chose.»

En 2018, il avait déjà réalisé un immense lustre composé d’une multitude de déchets récupérés dans le lac qui avait été exposé au sein des locaux de l’Organisation des Nations unies (ONU). Aujourd’hui, au travers de ses sculptures, l’artiste sensibilise toujours le public aux questions de gaspillage et de recyclage. Déjà à l’origine du plus grand lustre classique d’Europe, il rêve de créer le plus grand luminaire entièrement composé de déchets. Et il se peut qu’il s’agisse d’un projet qui se mette bientôt sur les rails… Joëlle Misson-Tille