Comme un air de Jugement dernier...

LES PLAY-OFF • Derrière ce moche anglicisme se cache tout un poème, sublime ou dramatique, qui crée un lien évident entre le hockey sur glace helvétique et Oscar Pistorius.

  • Les play-off ou le temps du Jugement dernier. dr

    Les play-off ou le temps du Jugement dernier. dr

Un championnat de hockey sur glace, c’est comme la vie: il y a des siècles où on a le droit de ne pas être en forme. Mais le grand moment, pour qui souhaite s’offrir la chance de ne pas le rater, il faut commencer par être en mesure de le provoquer. Or, pour la crème du puck suisse, c’est là, maintenant, que le train passe. 

Savoir surprendre

Depuis septembre, douze équipes jouent des crosses, ça crisse et ça dérape parfois. Cinquante matches pour éliminer quatre candidats et bien des calories, affiner les effectifs, huiler les mécaniques, resserrer les boulons et donner du grain aux trésoriers. Tout ça, c’est la «saison régulière» et, comme tous les préludes un brin longuets, elle manque de sel. Et puis vient le temps béni des play-off, qui commencent mardi prochain.

Play-off. Chaque année à même époque, on replonge avec joie dans la marmite. Parce que les play-off, c’est tout un poème, toujours identique en un sens, mais qui trouve les moyens de se renouveler sans cesse - et si c’était ça, la magie du sport? Savoir surprendre, la gloire pour les uns, le drame pour les autres.

Alors les barbes poussent et les dents pointent, prêtes à tomber au nom de la cause, sous les hourrah de la foule en délire. Du sport comme on l’aime.

Un excitant naturel

Les play-off, c’est un excitant naturel, des hauts de Fribourg à la Basse-Léventine, des rives genevoises aux altitudes davosiennes, via Zurich ou Lugano, sans parler du cœur de Vancouver ou de la banlieue de Lahti. Quelques semaines pour éliminer les faibles et révéler les braves. Les play-off, c’est les Jeux du cirque. Tout va se jouer présentement, sur un coup de lame ou de bâton; il y a comme une odeur de Jugement dernier dans l’air. Et d’un coup, on pense à Oscar Pistorius, pour qui le Jugement dernier n’est ni un tableau de Michel-Ange, ni un jour qui compte dans les Saintes écritures. Lui, champion aux jambes de carbone, héros mondialement déchu, comparaît depuis cette semaine devant un vrai tribunal. Son avocat va tâcher de prouver que les quatre balles tirées par son client à travers la porte, ce soir de Saint-Valentin dans un luxueux faubourg sursécurisé de Johannesbourg, n’étaient pas destinées à feu la petite amie de l’icône brûlée.

C’est fou comme le sport peut changer de rubrique, sur un coup de tête ou une truelle de sémantique malheureuse.

Et pendant ce temps-là, toujours à propos de play-off et de Jugement dernier, Roger Federer a gagné un tournoi de plus que John McEnroe, Ottmar Hitzfeld est devenu ambassadeur pour une marque de matelas et David Cameron a menacé de boycotter les Jeux paralympiques, dès vendredi à Sotchi - mais là, on change de sujet. n