Xherdan Shaqiri, cette boule de talent, rebondira-t-il?

CHRONIQUE • Pas question d’enterrer autant de promesses à 23 ans. Il n’empêche que Xherdan Shaqiri, joyau no1 du foot suisse, semble embarqué sur une pente savonneuse.

  •  Xherdan Shaqiri. DR

    Xherdan Shaqiri. DR

Et si Xherdan Shaqiri, 23 ans, était engagé sur cette pente peu douce qu’on appelle déclin, via une voie de garage dans la pointe nord du Staffordshire? Question impopulaire. Se demander si le joyau du foot helvétique a déjà produit ses plus jolis rayons, lui si jeune, ça frôle même le blasphème; l’offense à la patrie, surtout avant les 2 matches de l’équipe de Suisse, samedi à Bâle devant la Slovénie puis mardi en Angleterre, qualification pour l’Euro 2016 en jeu.

Une trajectoire à la baisse

Xherdan Shaqiri, qui nous lit bien sûr, va peut-être flamber sous les drapeaux, histoire de rabattre le clapet de celui qui jouait du clavier assis, comme il l’a déjà souvent fait (17 goals en 46 sélections). Et pourtant... A l’aune des espoirs suscités par son exceptionnel talent, on ne peut s’empêcher de jeter ce point d’interrogation sur la toile plus tout à fait blanche de sa carrière: et si «XS», qui a d’ores et déjà réussi sa phénoménale ascension sur l’échelle du portemonnaie, passait à côté d’une destinée sportive plus glorieuse encore?

On ne dit pas seulement ça parce que Stoke City, le club que Shaqiri vient de rejoindre pour 17 millions d’euros (record du club), semble taillé pour occuper le costume qui est le sien après 4 journées et 0 victoire: 18e du championnat d’Angleterre. Si le doute nous étreint à grande vitesse concernant «Shaq Attack», c’est en raison de la courbe générale qu’emprunte sa trajectoire depuis trois ans: à la baisse.

Triple champion de Suisse et consacré à juste titre grande star du FC Bâle à 20 ans, le jeune homme file au Bayern Munich. Il y file d’abord du très bon coton, sous la houlette d’un Jupp Heynckes au diagnostic prometteur: «Je suis convaincu qu’il deviendra important.» Son successeur, Pep Guardiola en personne, en décide autrement. Que cela soit dû à l’insensibilité du Catalan ou à l’incapacité de Shaqiri de franchir les caps, toujours est-il qu’il s’enlise en Bavière. Tant et si mal qu’il part à l’Inter Milan en janvier passé. Après quelques flambées initiales, le point mort. Engagé pour 4 ans et demi, le milieu offensif réussit en 3 mois la performance de décourager son coach Alberto Mancini.

Un coup de poker?

Alors comme chaque été depuis 2011, il a fallu spéculer sur l’avenir, le chemin à prendre, bille en tête et calculette en pogne. Direction Stoke, donc, la ville qui vit naître Sir Stanley Matthews et Robbie Williams. «Une décision parfaite», a assuré Shaqiri, laissant presque entendre que gamin déjà, il rêvait de porter le maillot rayé rouge et blanc des «Potters» - car oui, Stoke est aussi le berceau de la poterie britannique.

David Degen, clamant tout haut ce que beaucoup pensaient en sourdine, y est allé comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, qualifiant ce City-là de «club ascenseur pour joueurs gravement inadaptés». L’ex-international (et coéquipier de Shaqiri) est allé plus loin dans les colonnes de la «Nordwestschweiz», pointant le problème en direction d’Erdin, frangin et agent du joyau: «Il connaît le football à peu près aussi bien que moi les claquettes. L’apprenti commerçant a changé de branche et s’est improvisé manager. Son incapacité chronique fait avant tout du tort à son frère.»

Carrière à suivre, mais il va falloir piocher cet automne dans le Staffordshire. Xherdan Shaqiri a souvent entendu, dès ses premiers pas, qu’il était trop petit, qu’il n’arriverait à rien. Ce serait dommage qu’à force de se sentir trop grand, il finisse par rater la marche à laquelle son don le prédestine.