Non, les consommateurs ne veulent pas de fruits calibrés

Pour la grande distribution, c'est bel et bien la volonté des consommateurs qui justifie la disqualification des fruits et légumes non calibrés. Secrétaire générale de la Fédération romande des consommateurs, Sophie Michaud Gigon réfute cet argument.

La grande distribution pousse à une standardisation et uniformisation des formes et tailles dans les fruits et légumes (sans parler des variétés !). Lors de nos discussions avec les producteurs, ceux-ci relèvent souvent la pression que représente le calibrage sur une récolte et sur leur revenu. Il faut savoir, soit on veut une agriculture plus proche de la nature, et on est prêt à accepter les différences dans les formes et les grandeurs, soit on veut une agriculture complètement industrialisée et on accepte le gaspillage de tonnes de fruits et légumes qui n’entrent pas dans le calibrage imposé par la grande distribution. Les consommateurs qui témoignent leurs préférences à la FRC sont clairs: ils soutiennent une agriculture diversifiée et familiale et ils essaient de lutter contre le gaspillage alimentaire. Les résultats du sondage gfs effectué pour l’OFEV en 2014 sont intéressants: pour 77% des sondés c’est égal si une pomme a des taches ou une carotte ne correspond pas aux normes.

Lors de nos discussions avec la grande distribution sur les concombres qui doivent être droits ou les fraises qui doivent être sur les étals en février, la réponse est toujours la même: les consommateurs veulent cela. La FRC réfute cet argument. Bien entendu, entre une pomme tapée ou abîmée et une belle pomme, le consommateur choisira la qualité. Mais entre une pomme de 7 cm de diamètre et une pomme 2mm plus petite, le consommateur ne boudera ni l’une ni l’autre si la qualité est au rendez-vous. La qualité, c’est le goût, la fraîcheur. Et pour beaucoup, la proximité. On apprend l’inverse dans les cours d’économie, mais en fait, dans le monde de la consommation, l’offre influence la demande. Alors si la grande distribution veut des concombres droits pour des raisons logistiques, qu’elle assume le gaspillage que cela engendre, sans le mettre sur le dos des consommateurs.