Vélos, piétons et trottinettes: l’impossible cohabitation

Pour notre chroniqueur Philippe Kottelat, l'élan, donné à tout ce qui touche la mobilité douce, est en train de créer les conditions d’une cohabitation difficile.

  • Dans les villes, la cohabitation entre piétons et cyclistes devient difficile. 1,2,3 RF

    Dans les villes, la cohabitation entre piétons et cyclistes devient difficile. 1,2,3 RF

Tenter d’aménager une ville en pouvant y circuler correctement a, de tout temps, été un véritable casse-tête. Sans doute plus encore aujourd’hui, alors que la réalité du réchauffement climatique pousse les autorités à agir rapidement dans ce domaine avec, à la clé, le grand défi qui consite à vouloir réduire notre empreinte carbone en favorisant, envers et contre tout, une mobilité douce. Cette volonté a, entre autres, pour conséquence de voir se multiplier les vélos dans les cités, auxquels il faut notamment ajouter les trottinettes, les nouveaux «envahisseurs», ces petits engins qui ont contribué à nos joies d’enfants mais qui, électriques aujourd’hui, sont désormais conduits par une multitude de trentenaires ou de quadras – des vieux donc – qui ont sans doute raté quelque chose dans le passé et qui n’ont surtout pas peur du ridicule!

Quel est le cheminement intellectuel qui mène à ça? On laissera la question en supens. C’est ainsi! Le paradoxe, c’est que cet élan, donné à tout ce qui touche la mobilité douce, est en train de créer les conditions d’une cohabitation difficile. Pas seulement avec les automobilistes. Mais aussi entre piétons, cyclistes et utilisateurs de trottinette. Les tensions sont croissantes et les accidents en hausse. Un peu partout! Pourquoi? Parce que nombre de cyclistes, comme d’utilisateurs de trottinettes, entre autres, ne respectent pas les règles et que certains aménagements censés faciliter la mobilité douce ont été très mal conçus, poussant ces trois catégories à se croiser, alors que ça ne devrait jamais être le cas.

C’est tellement vrai que certaines municipalités ont décidé de réagir, comme celle de Neuchâtel qui, depuis août dernier, a interdit l’usage de la bicyclette dans sa zone piétonne du centre-ville, de nombreux cyclistes n’y roulant pas au pas et dérangeant les piétons. Celles et ceux qui ne respectent pas cette nouvelle règle sont désormais sanctionnés par les agents de la Sécurité publique. Une décision qui a bien évidemment suscité l’ire des défenseurs à tous crins de la petite reine qui ont lancé une pétition en ligne, estimant qu’elle ne s’inscrivait pas dans l’encouragement à la mobilité douce. On peut en discuter. Reste qu’il est paradoxal de constater qu’il y a quelques années, on réclamait davantage de places pour les vélos en ville et qu’aujourd’hui déjà beaucoup souhaitent en voir moins et qu’on montre plus de respect pour ceux qui y vivent et se déplacent à pied.

Finalement, tout cela démontre quoi? Simplement qu’à force de vouloir se montrer plus vertueux que les autres, plus rapides à s’inscrire dans le mainstream dominant en faisant parfois passer des décisions au forceps, cela au détriment d’un dialogue constructif, on finit par se retrouver confrontés à des réalités inédites qui vous font passer du jour au lendemain de bon à mauvais élève. C’est un peu comme avec le 30km/h de nuit: il réduit certes les nuisances sonores, mais certaines études démontrent aujourd’hui que cette mesure augmente aussi la pollution. Que d’affreux dilemmes en perspective pour nos politiciens!