«Beaulieu doit passer au 21ème siècle»

- Emanation des pouvoirs publics, la Fondation de Beaulieu loue, depuis 2010, les locaux de Beaulieu à la société MCH Beaulieu.
- Appartenant à un groupe bâlois, MCH Beaulieu est sous le feu des critiques, accusée de ne pas avoir tenu ses promesses
- Gustave Muheim président de la Fondation, défend la stratégie adoptée par son locataire principal, et développe les enjeux d'un site très cher au cœur des Vaudois.

  • Pour Gustave Müheim, Beaulieu est en phase de restructuration.

    Pour Gustave Müheim, Beaulieu est en phase de restructuration.

Sur le plan institutionnel, quelles sont les relations entre MCH Beaulieu et la Fondation de Beaulieu?

Beaulieu était à l'origine un comptoir géré jusqu'en 1999 sous l'égide d'une «Société coopérative du Comptoir suisse». Avec le temps, les pouvoirs publics se sont rendus compte que le capital social devait être augmenté. Suite à un vote du Grand Conseil, du Conseil communal de Lausanne et de nombreuses autres communes, la Fondation de Beaulieu a été créée en 2000. Elle compte des représentants des pouvoirs publics et est propriétaire des immeubles. La société MCH Beaulieu de son côté loue les lieux à la fondation. Elle est donc notre locataire

Comment a été choisie MCH Beaulieu en 2010?

La Fondation n'a pas cherché un nouveau locataire.A l'époque, celui-ci était la Société d'exploitation de Beaulieu, qui avait déjà des contacts avec le Groupe bâlois MCH, leader suisse dans son domaine et numéro 2 ou 3 en Europe. Notre locataire a décidé de s'appuyer sur lui pour avancer. Résultat: MCH a fait une «OPA amicale» sur la société d'exploitation de Beaulieu et MCH Beaulieu a ainsi été créée en juin 2010.

A l'époque, l'objectif de cette société était de faire augmenter considérablement le chiffre d'affaires du site. Or il semble que cette promesse n'a pas été tenue…

Je n'ai pas de chiffres sur MCH Beaulieu. Pour une raison simple: le groupe MCH dans son ensemble est coté en bourse et ne peut donc communiquer de données parcellaires.

Tout de même : une valse des directeurs, des salons qui ne marchent pas très bien… Votre locataire principal est en crise…Pas en crise.

Je dirais plutôt «en phase de restructuration» et la différence est importante. Dans cette entreprise, on assiste à un processus qui la fait passer du 20ème au 21ème siècle. Disons qu'en ce moment, ce processus est particulièrement visible.

Quoi que l'on pense, la population a vraiment le sentiment d'une crise, avec notamment la défection de nombreux salons…

Ce que la population ressent, ici, comme à Bâle ou à Genève d'ailleurs, c'est que les foires généralistes ne sont plus dans l'air du temps. Pour une raison simple: ces foires étaient un lieu privilégié qui permettait au public d'obtenir des rabais substantiels (le fameux «rabais Comptoir»). Or aujourd'hui c'est fini, les foires généralistes ont perdu cet avantage concurrentiel.

Pourtant, à l'inverse, on constate que la récente foire de Martigny a été un véritable succès.

Elle a bien marché en effet car il s'agit d'une foire régionale qui a conservé une taille humaine. A Lausanne en revanche, le bassin est trop important pour personnaliser des événements de ce type.

C'est donc la fin des grandes foires?

Disons que l'avenir est aux foires spécialisées. Beaulieu a créé par exemple Habitat et Jardin, qui a tout de même drainé 100'000 visiteurs. Une foire doit soit se spécialiser, soit ramener la campagne à la ville. Et ça, MCH Beaulieu l'a bien compris.

Donc MCH Beaulieu travaille correctement!

Tout à fait et le fruit de leur travail sera visible pour les Vaudois d'ici 2014, ou au plus tard en 2016! Il faut leur laisser du temps. J'ai longtemps été exposant et croyez-moi: personne d'autre qu'eux n'est capable de faire ce qu'ils font. C'est un métier qui ne s'improvise pas.

Est-il envisageable que, faute de réussite, MCH Beaulieu vous demande un jour une baisse de loyer?

La réponse sera non. Forcément, puisque les contrats l'interdisent. Au contraire, les contrats prévoient une augmentation de loyer en fonction des investissements que la Fondation consent.

Et si MCH venait à faire faillite?

Tout est toujours possible. Mais tout de même, je rappelle que le groupe MCH est en majorité entre les mains des pouvoirs publics bâlois et zurichois. Et en plus ce groupe se porte très bien!

Ils sont donc irréprochables?

Sur le fond oui. Sur la forme, ils sont très cartésiens, et il leur manque un peu d'émotion, apprendre à s'imprégner de notre mentalité vaudoise. Je suis sûr qu'ils en sont capables.

L'EPFL s'apprête à ouvrir un immense centre de congrès. Cela ne risque-t-il pas de plomber les activités de MCH Beaulieu?

A la Fondation, nous avons anticipé cette ouverture, et choisi la prudence en freinant certains investissements «mammouth» dans notre zone «congrès». Mais j'entrevois plus une démarche complémentaire que concurrentielle.

Selon vous, quels défis devra affronter Beaulieu dans les 20 ans à venir?

Clairement, le financement des halles nord reste un enjeu majeur, mais nous sommes dans l'attente de ce qui va se décider pour la Tour de Beaulieu, car il n'est pas possible de démarrer deux chantiers de cette importance en même temps. J'ajoute d'ailleurs que la tour de Beaulieu, avec son futur hôtel, est fondamentale pour le développement du site. C'est le deuxième enjeu crucial: aucun grand centre en Europe n'a fait l'impasse sur une infrastructure hôtelière à proximité immédiate. Enfin, il reste aussi la question culturelle avec le Théâtre de Beaulieu qui nécessite des investissements qu'il n'appartient pas à un exploitant de faire. Tôt ou tard, il reviendra aux pouvoirs publics de répondre aussi à cette problématique.

«Personne d'autre que MCH Beaulieu n'est capable de faire ce qu'ils font. C'est un métier qui ne s'improvise pas!»