« Si notre pays fait cavalier seul, les dégâts seront énormes» François Launaz, président d’auto-suisse
Le nom ne vous dira rien, sauf si vous êtes passionné ou Allemand: Borgward. Cette marque automobile disparue en 1961 a choisi Genève pour renaître. Tout un symbole, elle aurait pu attendre Francfort cet automne.
C’est ainsi, et les Suisses peinent à s’en rendre compte: le Salon international de l’Automobile de Genève est l’un des «big five» du monde, aux côtés de Detroit, Paris, Francfort et Tokyo.
La part du rêve
Dénué de constructeur national, Genève les met tous à égalité. Et bien que les hôtels coûtent cher, les stands ont un prix au mètre carré inférieur de moitié par rapport à Francfort ou Paris, même avec le franc fort. Cette situation permet à de petites marques exclusives de présenter leurs réalisations.
Aucun autre salon n’en dénombre autant, parmi elles, Sbarro, le seul Suisse, même si son école est juste de l’autre côté de la frontière. A Genève, les modèles uniques, ou en série limitée, allument des étincelles d’admiration dans les yeux des visiteurs. La rareté a son prix, près de deux millions pour une Bugatti, 2,5 pour la Ferrari revisitée par Glickenhaus…
Une menace réelle
5,79 millions de véhicules motorisés circulent en Suisse, dont 4,38 millions de voitures. Les 220’000 personnes actives dans la branche réalisent 90,5 milliards de chiffre d’affaires, 15% du PIB (Produit Intérieur Brut). En comparaison, les banques totalisent 120’000 emplois pour 10% du PIB. Mais
une menace plane sur ce monde. Le président d’auto-suisse (l’association des importateurs) François Launaz avertit: si notre pays fait cavalier seul en matière de normes, les dégâts seront énormes. Explication: les émissions de CO² doivent s’abaisser à 95g/km d’ici à 2020. Les constructeurs s’y emploient, d’ailleurs sur les 900 modèles exposés au Salon, une centaine les respecte déjà. Gros souci: les politiques veulent appliquer la norme en prenant les moyennes suisses et non celles de l’Europe comme le font tous les pays de l’Union européenne, mais aussi la Norvège et l’Islande. Comme les Suisses aiment bien les 4x4 et la sécurité au top, car ils estiment en avoir besoin et en ont les moyens, cela augmente le poids et la consommation. Ce calcul risque de coûter cher en taxes avec nos émissions un peu supérieures.
Le Parlement tranchera
En chiffres: la pénalité que les constructeurs ont payée pour les grammes de CO² dépassant la norme était de cinq millions l’an dernier. Répartie sur les 300’000 voitures commercialisées, cela n’est pas grand-chose. En 2021, si la Suisse faisait cavalier seul, ce serait cent fois plus, un demi-milliard de taxes selon auto-suisse. Intenable, les voitures renchériraient trop! Les Suisses ne voudront pas se laisser imposer l’achat de voitures plus petites, ni se tourner massivement vers le diesel. Ils achèteront de fausses occasions: des véhicules immatriculés six mois à l’étranger, importés et échappant ainsi à cette taxe. Un coup dur pour les revendeurs officiels. Et sans le moindre résultat sur l’abaissement des émissions de dioxyde de carbone. Le projet est en mains du Parlement… à suivre.