«Il convient de préparer le canton à des temps plus durs»

- Charme latin, sens du compromis à la vaudoise, Nuria Gorrite est la valeur montante du Conseil d’Etat, à qui tout réussit.
- En deux ans et demi de mandat, l’ancienne syndique de Morges s’est coulée dans le moule du Conseil d’Etat avec une aisance déconcertante.
- Populaire à droite comme à gauche, la magistrate socialiste esquisse un premier bilan de son action.

  • Un bilan de mi-législature totalement réussi. VERISSIMO

    Un bilan de mi-législature totalement réussi. VERISSIMO

«On attend de moi que je prenne des décisions»

Vos dossiers évoluent de manière très favorable, votre popularité est au zénith. On a l’impression que tout vous réussit, au point que le seul reproche que l’on trouve à vous faire, c’est d’avoir «une main de fer dans un gant de velours»!

Pour ce qui est du succès, il faut rester modeste, car rien n’est vraiment durable! Les succès, comme les échecs d’ailleurs, ne sont jamais éternels (rires). Quant à la main de fer, je l’assume et je la revendique. Je ne suis pas là pour faire uniquement des synthèses! Je suis volontiers une force d’écoute, mais une fois que je me suis forgée une idée, je la défends, car on attend de moi que je prenne des décisions!

En deux ans et demi, vous avez pris vos marques au Conseil d’Etat avec une aisance déconcertante!

Si vous voulez! Mais plusieurs éléments peuvent l’expliquer. D’abord ma formation de base en tant que députée-syndique d’une ville comme Morges m’a beaucoup préparée, tant dans la confrontation au terrain que dans la gestion d’une administration. Toute la Côte est un concentré des problématiques du canton, en termes de mobilité, d’infrastructures ou de population. Du coup, quand on arrive au Conseil d’Etat, les modes de fonctionnement sont similaires même si les enjeux sont bien sûr différents. L’autre paramètre, c’est que les douze années passées à la Municipalité m’ont donné un extraordinaire réseau sur le terrain.

Avoir une majorité de gauche au Conseil d’Etat a quand même dû vous rendre les choses plus faciles, non?

Evidemment que ça m’a aidée! Cette configuration particulière d’un Conseil d’Etat à gauche et d’un parlement à droite a créé une alchimie assez intéressante car la recherche du compromis oblige notre collège à chercher des majorités et à conjuguer des ambitions.

N’est-ce pas d’autant plus facile que les cordons de la bourse se sont un peu relâchés?

Bien sûr. Au Conseil d’Etat, nous savons d’où nous venons en matière d’endettement, et personne n’a envie de revenir aux années noires. Mais la volonté d’aujourd’hui est d’investir, et dans un département comme le mien où prévaut une vision à long terme, c’est l’idéal. Notre responsabilité est de préparer le canton à des temps plus durs, et il s’agit de potentialiser nos atouts en termes d’infrastructures, de mobilité, de formation…

Avec le recul qu’auriez-vous fait différemment depuis votre entrée en fonction?

J’aurais essayé de concrétiser plus vite la réorganisation qui a conduit à la formation de la Direction générale de la mobilité et des routes. Nous sommes un des premiers cantons suisses à le faire, et clairement cela ouvre un immense potentiel...

L’un des dossiers qui avance à grand pas est celui du LEB, dont une partie sera enterrée.

Enfin! Si tout va bien, ce sera concrétisé d’ici 2020. Et la Confédération va en financer une grande partie, signe que l’on a été entendus!

En revanche, le rapprochement entre les tl et le LEB suscite quelques frictions…

Comme pour tout changement, ce n’est pas facile pour ceux qui le vivent, et je peux comprendre les inquiétudes, surtout avec un tel esprit de «militance» chez les cheminots. Mais j’ai une grande confiance dans la direction des tl pour que tout cela aboutisse dans l’écoute de chacun.

Que dites-vous à la dame dont la maison sera rasée en raison des travaux annoncés?

Que je comprends qu’elle soit inquiète et déstabilisée. Mais nous menons un projet dont l’intérêt public est reconnu par tous. Il faut donc négocier avec autant de sérénité que possible, et avec le plus grand respect pour cette dame, et tâcher d’arriver à une solution acceptable pour tous, comprenant notamment une indemnité.

Autre dossier en suspens, celui de la CGN. Les frontaliers qui empruntent ses lignes continuent à clamer leur mécontentement!

Mais ils ont raison, vu leur situation! Le Canton de Vaud a beaucoup œuvré au développement d’une offre de transport lacustre, qu’il finance même de façon prépondérante. Et aujourd’hui, les choses continuent à avancer. Des études sont menées avec nos voisins français, notamment en termes de chaîne de mobilité (développement de parkings, de réseaux de bus etc.), de statuts juridiques, de choix des bateaux, etc. Tout cela prend du temps et la balle est aussi dans le camp français…

En attendant, les usagers vont encore souffrir…

Non, nous agissons. Ainsi, le «Ville de Genève» prévu pour le tourisme a été affecté au transport transfrontalier, afin d’améliorer la situation. Je suis en outre en train de négocier pour obtenir le matin ou le soir, un doublement de l’offre sur la ligne Evian-Lausanne.

Venons-en à la politique, avec les futures élections au Conseil d’Etat…

Franchement, nous ne sommes qu’au milieu de la législature, et la route est encore bien longue d’ici là… La seule chose que je peux dire, c’est que pour l’instant tout se passe bien… Ce métier a quelque chose de fascinant et de déstabilisant à la fois, qui veut que ce qui est vrai aujourd’hui ne l’est pas forcément demain!

Tout de même, vous serez candidate à votre propre succession?

Oui, bien sûr, dans la mesure où mon parti veut de moi…