Jacky Delapierre: 40 ans après, une passion intacte!

Le 9 juillet, Athletissima vivra sa 40e édition dans le mythique stade de La Pontaise. Cet événement est aujourd’hui considéré parmi les meilleurs de la planète en matière d’athlétisme. A son origine, Jacky Delapierre qui en est devenu tout à la fois l’âme et le bras armé.

  •  Jacky Delapierre, une passion au service de l'athlétisme. VERISSIMO

    Jacky Delapierre, une passion au service de l'athlétisme. VERISSIMO

«En 40 ans, le budget est passé de 68’000 à 4,7 millions de francs» Jacky Delapierre

Lausanne Cités: Au-delà d’une aventure nourrie de passions et tissée d’amitiés depuis ses tout débuts à Vidy, Athletissima re-présente quoi pour vous?

Jacky Delapierre: Un bon bout de ma vie. En partant de rien. Avec des potes qui avaient la même passion que moi, on a réussi un truc extraordinaire. Cette passion, j’ai pu la vivre, maintenant encore, grâce à mon employeur de toujours, La Vaudoise, qui m’a soutenu et m’a laissé le temps nécessaire pour l’assouvir. Je lui en serai éternellement reconnaissant.

Au départ, mettre sur pied une réunion d’athlétisme, n’était-ce pas un pari un peu fou?

Au début, oui. Ensuite il y a eu des hauts et des bas. Mais par la suite, on a pu s’appuyer sur des Fondations et compter sur l’aide de la Ville comme du Canton.

Vous parlez de hauts, mais aussi de bas…

J’ai vécu des périodes compliquées. Le budget oscillait entre 400 et 450’000 francs. On perdait des sous. J’étais employé à la Vaudoise et j’avais deux gamins à la maison. Par manque de moyens financiers, je n’ai pas eu la chance de faire des études. Mon papa, décédé quand j’avais 21 ans, était typographe et ma maman, vendeuse. J’ai donc dû me débrouiller et me construire sur les valeurs qu’on m’avait inculquées. Ça m’a permis de grandir dans la vie. Et on s’en est sorti.

Vous n’avez donc jamais pensé mettre un jour la clé sous le paillasson?

Si, en 2002 ou en 2003. A cause de gros égarements administratifs, nous avions 1,3 million de dettes (TVA et impôts à la source). J’avoue que je n’ai pas bien dormi durant des nuits. Le remboursement de l’impôt à la source s’est étalé sur plusieurs années. La TVA a été réglée. Tout ça a mis du temps. La Ville et le Canton nous ont aidés. Afin que ça ne se reproduise plus, nous avons créé l’Association Athletissima.

Il y a sans doute mille raisons d’expliquer la longévité d’Athletissima au plus haut niveau. S’il fallait en ressortir une, ça serait laquelle?

La loyauté, qui est une pièce du puzzle de notre image. Le fait d’avoir su vendre un produit avec quelques valeurs ajoutées auquel tout le monde a rapidement adhéré. On n’a jamais triché, ni avec les athlètes ni avec le public. La confiance, la crédibilité passent par ce stade. La transparence aussi. J’ai toujours tenu à connaître personnellement les athlètes que nous engagions.

Et ils veulent revenir à Lausanne…

Oui, parce qu’ils aiment la ville, le stade, l’ambiance. Comme Usain Bolt qui aime cette piste et courir le 200 mètres parce qu’il trouve le virage unique au monde. De surcroît, tous sont payés rubis sur l’ongle, ce qui nous rend également crédibles.

En 40 ans, le budget a explosé, passant, pour imager le propos, de l’âge… de la pierre à celui du numérique ?

Le premier, en 1977, était de 68’000 francs. En 2015, il est de 4,7 millions de francs. L’argent du meeting est pour le meeting. Pour les festivités du 40e, il y a un autre budget. S’il manque des sous, s’il faut en trouver, je creuse.

Le dopage est un problème important dans le sport aujourd’hui, notamment en ce qui concerne l’athlétisme. Vous avez été un des premiers patrons de meeting à réengager des athlètes qui s’étaient dopés. Pourquoi?

Parce que je suis contre la double peine. Je suis peut-être un idéaliste, mais je reste persuadé que l’athlète est, dans le 80% des cas, une victime. L’IAAF est la Fédération qui opère le plus de contrôles dans le monde. Ceux qui se sont fait attraper n’ont pas le culot de me demander de l’argent en plus. Tenez: le 9 juillet sur 100 m, il y aura Powell, Gay et Gatlin. Ces trois athlètes, tous en rémission, me coûtent moins cher qu’un seul à la grande époque.

Le dopage disparaîtra-t-il un jour?

Non, il existera toujours, la guerre sera perpétuelle. Le vrai combat contre le dopage ne pourra se faire que quand les pharmas participeront à cette lutte. Sinon, les sportifs auront toujours une longueur d’avance.

Qu’en est-il du stade d’athlétisme, du retour au stade de Pierre-de-Coubertin prévu en 2019 ou en 2020?

Un concours d’architectes va démarrer à fin juillet. Il aura 10’000 places couvertes - 2 tribunes amovibles avec toit - et 2000 autres; avec des modules de loges. Il n’y aura rien de fixe (contenance actuelle pour Athletissima au stade olympique: 14’232 places). Le stade ne sera pas utilisé que pour Athletissima. Il vivra. S’il correspond à mes vœux ? (Pause). Pas tout à fait, mais il sera conforme aux obligations de la Diamond League.

Vous êtes lié à la Diamond League jusqu’en 2019. Et après?

Une nouvelle licence nous sera donnée pour autant que les travaux soient en cours dès 2018. Ou avant, ce qui serait encore mieux. Cette situation est sans appel.