RIE III qui rit, RIE III qui pleure

  • Le PS suisse menace de lancer un référendum contre le projet fédéral d’imposition des entreprises RIEIII.
  • L’application vaudoise de RIEIIIa en revanche été plébiscitée par le peuple le 20 mars dernier. 
  • Artisan du projet vaudois, opposant au projet fédéral, le socialiste Pierre-Yves Maillard se dit serein.

  • RIE III: les Vaudois dans le piège fédéral?

    RIE III: les Vaudois dans le piège fédéral?

  • Pierre-Yves Maillard et Pascal Broulis, une même voix pour RIE? keystone

    Pierre-Yves Maillard et Pascal Broulis, une même voix pour RIE? keystone

«La droite au Conseil National veut la bagarre»

Pierre-Yves Maillard, président du Conseil d’État vaudois

Un air de déjà vu! Alors que le parti socialiste suisse montre les dents et annonce le lancement d’un référendum contre la loi RIE III actuellement en négociations aux chambres fédérales, il semble donc de plus en plus probable que les électeurs vaudois, à l’instar de tous les Suisses, soient appelés aux urnes dans un avenir proche pour trancher sur RIE III fédéral. Ceci, quelques mois à peine après avoir plébiscité RIE III Vaud.

Avec un résultat relativement cocasse, quoique fréquent en politique, qui sera de voir le Conseiller d’État Pierre-Yves Maillard s’opposer au paquet RIE III fédéral, en compagnie de l’extrême gauche vaudoise, celle-là même à laquelle il s’était opposé pour le paquet vaudois.

«Totale cohérence»

«Il est clair que comparé à Pierre-Yves Maillard, nous sommes en totale cohérence, lance un rien goguenard Pierre Conscience, de Solidarités Vaud. Et il est clair également que dans le canton, l’attitude du PS vaudois ne va pas aider à avoir un bon résultat à l’éventuel référendum fédéral.»

Et d’ajouter: «De notre côté, nous nous tenons prêts au combat depuis la fin de la campagne vaudoise qui, pour nous, n’était qu’une répétition générale. Ceci d’autant qu’une coalition nationale semble voir le jour, avec le parti socialiste suisse qui s’engage enfin».

Il faut dire que le paquet RIE III en négociations au niveau fédéral a tous les défauts que Solidarités Vaud reprochait au RIE III vaudois, mais en pire: des déductions fiscales importantes, avec des compensations sociales dérisoires, à mille lieues du paquet équilibré qui a récemment reçu, avec 87% des voix, le plébiscite des Vaudois.

«Je regrette profondément que le Conseil National n’ait pas saisi la perche équilibrée tendue par le Conseil des États, déplore ainsi le socialiste Pierre-Yves Maillard, président du Conseil d’État vaudois. Il s’agit d’une gifle au Conseil des États qui montre que la droite au National veut vraiment la bagarre, et ce n’est vraiment pas l’intérêt du pays».

Deux contenus, un même nom

De fait, le magistrat se dit «serein» et différencie RIE III Vaud et RIE III fédéral, «deux projets qui ont le même nom mais pas le même contenu». Et d’ajouter: «Le PS suisse est dans son rôle. Il craint d’être marginalisé et de voir l’État social se faire laminer. Avec un peu d’efforts, l’affrontement inévitable aurait pu avoir lieu sur un autre dossier que celui-ci, si important pour notre économie. Mon engagement pour le paquet vaudois s’explique justement par un compromis bien négocié en faveur des classes les plus modestes. Le type même de compromis qui semble si difficile à obtenir au niveau fédéral en raison du renforcement de la droite».

Reste une question, et qui ne relève en aucun cas de la politique fiction au vu de l’évolution du rapport de force politique fédéral: qu’adviendrait-il du RIE III vaudois dans le cas où le peuple suisse rejetterait en référendum le RIE suisse?

Contrairement au Conseiller d’État Pascal Broulis (lire l’interview ci-dessous), le président du Conseil d’État se montre confiant: «Si la loi est rejetée en référendum, comme nous l’avons toujours dit, les chambres fédérales devront élaborer une future loi, forcément meilleure, car l’abolition des statuts fiscaux particuliers est un engagement international de la Suisse. Si le référendum échoue en revanche, RIE III vaudois entrera en vigueur à la date prévue et qui plus est assortie des compensations fortes que nous avons obtenues avec le soutien du peuple vaudois en votation.»

Pascal Broulis: "Tout serait remis en question"

Le Conseiller d’État en charge de l’économie est, avec Pierre-Yves Maillard, l’artisan du succès de RIE III en votation vaudoise.

Le Parti socialiste suisse annonce qu’il va lancer un référendum national contre RIE III...

Je trouve surprenant qu’on annonce un référendum alors que les Chambres n’ont pas fini leurs travaux. Je crains qu’il y ait pas mal de dogmatisme dans cette posture. Avec ce référendum, le PSS s’attaque à la prospérité du pays, aux emplois, qui devraient au contraire, me semble-t-il, être au premier rang de ses préoccupations. Je n’ai pas de pronostic à faire sur le résultat, mais je souhaite que la RIE III, indispensable pour les emplois en Suisse, l’attractivité économique de notre pays et l’acceptabilité internationale de notre système fiscal, puisse être rapidement mise en œuvre.

Le canton n’a-t-il pas été trop vite en besogne en faisant adopter la version vaudoise de RIE III?

Certainement pas, car il s’agissait de rassurer les entreprises installées dans le canton de Vaud, en particulier celles qui perdront leurs statuts fiscaux particuliers et qui sont très importantes pour la diversité de notre tissu économique. Il s’agissait de le faire dans un contexte où d’autres incertitudes pèsent, comme l’application de l’initiative contre l’immigration de masse, ou l’abandon du taux plancher du franc suisse face à l’euro, qui n’est toujours pas complètement digéré. Les entreprises nous remercient de leur avoir ainsi indiqué un cap fiscal.

Que se passerait-il pour le paquet vaudois plébiscité récemment, au cas hypothétique où le référendum suisse serait gagné par la gauche?

Le Conseil d’État devra revenir devant le Grand Conseil dans les six mois avec un rapport proposant les mesures nécessaires au rééquilibrage de la réforme sur le plan cantonal. En fait, tout serait remis en question, aussi bien les mesures fiscales que les mesures d’accompagnement soutenant le pouvoir d’achat des ménages.