Les transports du futur se dessinent à l’EPFL

MOBILITÉ • Les premiers essais du système de transport ultrarapide Hyperloop débuteront cet hiver à l’EPFL. Visite dans le laboratoire de cette infrastructure unique en Europe.

  • Le «tunnel» de l’Hyperloop, à deux pas de l’EPFL, où tous les tests de transport sous-vide seront effectués dès cet hiver. PHOTOS MISSON

    Le «tunnel» de l’Hyperloop, à deux pas de l’EPFL, où tous les tests de transport sous-vide seront effectués dès cet hiver. PHOTOS MISSON

  • Mario Paolone, directeur du DESL, et Georgios Sarantakos, chef de projet, à côté du tube du système Hyperloop.

    Mario Paolone, directeur du DESL, et Georgios Sarantakos, chef de projet, à côté du tube du système Hyperloop.

Situé sur un petit terrain herbeux du site de l’Université de Lausanne, à quelques pas de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL), ce tuyau, d’une longueur circulaire de 120 mètres, entouré de hautes herbes, présente un aspect plutôt modeste. Pourtant, ses moindres détails ont été pensés minutieusement. Fabriqué en aluminium pour limiter les coûts nécessaires à sa fabrication, peint en blanc afin de minimiser les pertes de chaleur dues à la dilatation thermique, tout a été réfléchi. Soixante petites sections, de six degrés chacune, sont accolées les unes aux autres, dans un alignement dont la précision reste à être vérifiée lorsque le tuyau sera soumis à la dépressurisation et aux changements de température.

Unique en Europe

Pour en arriver là, les membres de l’équipe travaillant sur l’Hyperloop - professeurs et étudiants - ont œuvré sans relâche à l’intérieur d’un petit laboratoire grisâtre, à l’entrée duquel un panneau défend l’accès aux visiteurs autres que les membres autorisés du Laboratoire des systèmes électriques distribués (DESL), responsable de développer le système de propulsion de la capsule. Ils travaillent en collaboration avec la start-up suisse Swisspod, en charge du développement de la capsule elle-même.

Plusieurs ordinateurs, un prototype de segment de tuyau, une imprimante 3D servant à la fabrication en fibre carbone de l’«aéroshell», partie externe de la capsule, légère et aérodynamique, et de son châssis, ou encore un système destiné à tester les caractéristiques de la batterie, habillent ce lieu de travail qui a permis de donner naissance aujourd’hui à la première infrastructure européenne de ce genre. Unique, car elle permet de simuler une trajectoire d’une longueur quelconque et infinie sous vide. «Les infrastructures de tests existantes étaient des pistes de quelques kilomètres. Elles ne permettaient pas d’étudier le comportement de la capsule sur plusieurs centaines de kilomètres, ce qui implique également la résolution de plusieurs problèmes d’ingénierie», indique le professeur Mario Paolone, directeur du DESL.

Optimiser la capsule

Aujourd’hui, les modèles développés doivent être validés in situ. Une petite cabine depuis laquelle les chercheurs pourront suivre l’évolution de la capsule à l’intérieur du tunnel d’aluminium, grâce à une multitude de capteurs, qui utiliseront la technologie 5G, jouxte le tube. «Il s’agira d’y tester les pertes de pression, ainsi que la communication entre les différents éléments à l’intérieur du tube», résume Georgios Sarantakos, chef de projet au DESL. Mario Paolone ajoute: «Ainsi, la période de test servira à étudier et optimiser, par exemple, le déplacement de la capsule vis-à-vis des conditions de pression et de température internes au tube, mais aussi vis-à-vis des rails sur lesquels elle se déplacera grâce à un moteur à induction linéaire intégrant la lévitation magnétique.»

Le transport de demain

Ce système de lévitation magnétique, tout comme la technologie sous vide, en réduisant les frottements de l’air et des rails, permettront à l’Hyperloop d’atteindre des vitesses très élevées, pour une consommation énergétique moindre. Car c’est bien de cela qu’il s’agit: à échelle réelle, ces expérimentations permettront le développement futur de transports ultrarapides et dont la consommation énergétique par passager sera environ dix fois plus basse que celle d’un voyage en avion. Si, techniquement, la vitesse de l’Hyperloop peut atteindre 1200km/h, «du point de vue de l’efficience énergétique, il n’y a aucun intérêt à se déplacer si vite, car la dépressurisation nécessaire à la mise sous vide est énergivore. La vitesse optimale afin d’avoir le moins de pertes possibles se trouve autour des 600 à 700 km/h», précise Mario Paolone.

De plus, «l’Hyperloop ne doit pas être confondu avec un train. Il est utile sur plusieurs centaines ou milliers de kilomètres, car il a besoin d’une certaine distance pour atteindre sa vitesse de croisière. En ce sens, il fera plutôt concurrence aux avions intracontinentaux.» Il ne sera donc certainement pas question de relier Lausanne à Genève en six minutes, même si l’idée séduirait certainement plus d’un pendulaire. En revanche, diminuer considérablement la durée des voyages entre les grandes villes européennes à un coût abordable, tout en réduisant leur impact écologique, semble plus que jamais à notre portée.