23 septembre: l’avenir alimentaire du pays en question

  • Le 23 septembre, les électeurs se prononceront sur deux objets: L’initiative «pour des aliments équitables» du Parti écologiste suisse et celle «pour la souveraineté alimentaire», lancée par le syndicat paysan Uniterre.
  • La première veut que les denrées consommées dans le pays répondent à des normes écologiques et sociales minimales. La seconde que l’approvisionnement soit assuré au moins pour moitié avec des denrées alimentaires indigènes et des aliments indigènes pour les animaux.
  • Pour en débattre, Lausanne Cités a convié deux représentants de la société civile, Sophie Michaud Gigon, Secrétaire générale de la Fédération romande des consommateur et Gilles Meystre, Président de GastroVaud.

  • Sophie Michaud-Gigon et Gilles Meystre DR

    Sophie Michaud-Gigon et Gilles Meystre DR

  • Gilles Meystre DR

    Gilles Meystre DR

  • Sophie Michaud-Gigon, Secrétaire générale Fédération romande  des consommateurs dr

    Sophie Michaud-Gigon, Secrétaire générale Fédération romande des consommateurs dr

Gilles Meystre - CONTRE

Lausanne Cités: Globalement, ces initiatives défendent la vision d’une agriculture à taille humaine, plus durable, plus écologique. Voilà des arguments qui devraient ravir le défenseur des produits du terroir que vous êtes…

Oui, je défends les agriculteurs en créant des événements autour de leurs produits, en encourageant les circuits courts, en défendant nos traditions culinaires et la cuisine «fait maison». C’est bien plus efficace que de mettre l’agriculture sous cloche, comme le proposent les deux initiatives!

Cela dit, quels sont les deux arguments majeurs qui vous poussent à les refuser?

Fondamentalement, ces initiatives respirent le paternalisme: en cas de oui, l’Etat ne serait plus chargé de soutenir l’agriculture. Il en prendrait les commandes! C’est faire insulte à la branche et à sa capacité de s’adapter au marché. Et c’est faire insulte au consommateur et à son libre choix, puisqu’en fin de compte, c’est l’Etat qui dicterait le contenu de nos assiettes. Pas étonnant que les agriculteurs soient eux-mêmes divisés!

L’hôtellerie-restauration en serait aussi affectée, dites-vous également. Pouvez-vous nous expliquer en quoi ?

La restauration a besoin de produits importés pour satisfaire sa clientèle. Il suffit de penser aux fruits et légumes ou aux produits de la mer, qu’on ne peut produire et pêcher sous nos latitudes. Si l’initiative passe, l’Etat pourra frapper d’impôts ces produits. Résultat programmé: une baisse de la diversité de l’offre et une hausse des prix.

Reste que dire oui, c’est aussi dresser un rempart à la volonté du Conseil Fédéral de réformer l’agriculture suisse, lui qui souhaite ouvrir plus les marchés, au risque de mettre en péril l’autonomie alimentaire de notre pays qui descendrait alors de 60% ….

C’est par l’envie qu’on aidera nos agriculteurs. Pas par la contrainte et les pleurs! Si chaque consommateur prend la peine de goûter nos produits agricoles, un jour de marché, un grand pas sera fait en faveur de l’agriculture! Et ce sera bien plus efficace que le nouveau plan Wahlen proposé par les initiants !

 

Sophie Michaud Gigon  - POUR

Lausanne Cités: La FRC n’a donné aucune recommandation concernant l’initiative d’Uniterre dite «Pour la souveraineté alimentaire». Pourquoi?

La FRC soutient une grande partie du texte (durabilité de l’agriculture, absence d’OGM, prix équitables p.ex.), mais estime qu’il va trop loin concernant les taxes imposées aux produits importés.

Vous vous êtes par contre fortement engagée pour la seconde, celle pour des aliments équitables. Elle vise à rendre les assiettes des Suisses plus éthiques. Elles ne le sont pas aujourd’hui?

Personne ne peut dire que l’ensemble de l’offre alimentaire est éthique en Suisse: œufs de poules en batterie, viande d’animaux nourris aux OGM, huile de palme produite avec des pesticides interdits en Suisse… La liste est longue...

... mais la Suisse produit elle-même environ la moitié des denrées alimentaires dont elle a besoin et celles-ci doivent déjà répondre à des standards élevés. Ce texte n’est-il pas simplement superflu ?

Le texte offre justement la possibilité d’améliorer l’offre, à commencer par la moitié des denrées qui sont importées. Il propose de définir des lignes rouges qui élimineraient du marché les aliments produits dans des conditions que les consommateurs réprouvent.

Sa mise en application aura pour effet de renchérir les prix de nombreux produits et il pourrait entrer en conflit avec des accords internationaux. Cela ne vous gêne pas?

Ce sont avant tout le transport, la transformation et la distribution qui ont une influence sur le prix final d’un aliment. Importer des denrées provenant d’exploitations ayant des coûts de production plus élevés ne devrait donc pas mener à une hausse des prix, pour autant que la mise en œuvre de l’initiative soit bien réfléchie.

Finalement, plutôt que vouloir imposer des interdictions ou des restrictions, ne serait-il pas plus simple de jouer sur la transparence envers le consommateur ?

C’est ce que demande la FRC depuis 60 ans! Mais les acteurs du marché font de la résistance. De plus, on demande toujours au consommateur d’être responsable, or il n’a pas toujours les informations nécessaires pour jouer son rôle de régulateur du marché. C’est donc au tour de l’offre de s’améliorer.

Propos recueillis par Philippe Kottelat