«5 chefs, des produits récupérés, une expérience culinaire unique»

- Chaque jour dans le canton, Table Suisse récolte plus de 2 tonnes d’aliments consommables mais jetés en raison d’une date de vente dépassée.
- Du 19 au 23 décembre, les Lausannois pourront déguster des mets préparés par 5 chefs émérites à partir d’aliments récupérés.
- Interview du conseiller communal Denis Corboz, à l’origine des «Soirées 2e Service».

  • "5 chefs, des produits récupérés, une expérience culinaire unique"

    "5 chefs, des produits récupérés, une expérience culinaire unique"

  •  Denis Corboz à gauche, et Bastien Marmier responsable de Table Suisse. Ca

    Denis Corboz à gauche, et Bastien Marmier responsable de Table Suisse. Ca

  •  «Sensibiliser le public au gaspillage alimentaire»

    «Sensibiliser le public au gaspillage alimentaire»

«Ce qui comptele plus, c’est de sensibiliser le grand public au scandale du gaspillage alimentaire»

Comment vous est venue l’idée de créer les Soirées 2e service?

C’est au moment de mon arrivée au conseil communal que l’idée m’est venue. Les premiers mois y ont été rudes, le temps que l’apprentissage se fasse. Alors que j’étais à la recherche d’un sujet intéressant, j’ai vu passer par hasard une camionnette de Table Suisse. Un peu naïvement, je les ai appelés et c’est comme ça que j’ai rencontré Baptiste Marmier (ndlr, le responsable pour les cantons de Vaud et de Neuchâtel). Ce jour-là j’ai appris quelque chose qui m’a beaucoup surpris...

De quoi s’agit-il?

J’ai compris que contrairement à ce que je pensais, Table Suisse ne manque absolument pas de nourriture, bien au contraire. Que la question n’était donc pas en termes de disponibilité d’aliments, mais bel et bien de redistribution. C’est comme ça que l’idée des Soirées 2e service est née: proposer des repas confectionnés à partir d’aliments encore bons à la consommation mais dont la date de vente était dépassée...

Pourquoi avoir voulu que ces repas soient cuisinés par de grands chefs de la gastronomie?

Je voulais associer les contraires: des aliments dont on croit qu’ils ne sont plus mangeables, à des chefs que l’on assimile toujours à la qualité gastronomique. Le but final étant de surprendre le public, plus d’ailleurs par une sensation gustative que par un raisonnement intellectuel!

Convaincre des chefs, dont certains sont mêmes recensés au Gault & Millau, a-t-il été facile?

Non pas au début! Mais on finit toujours par rencontrer des personnes ouvertes avec un petit grain de folie pour tenter des choses nouvelles. Ce qui m’a en outre frappé, c’est qu’à chaque fois, les chefs ont été très surpris du niveau de qualité des produits récoltés par Table Suisse, des aliments destinés au départ à la poubelle. Mais il faut dire que leur expérience et leur créativité y sont pour beaucoup!

Au fond, il est clair que ces soirées ne permettent pas d’écouler les surplus de Table Suisse?

Non ce n’est pas envisageable du tout - il y en a trop - et ce n’est pas vraiment l’objectif. Ce que nous cherchons avant tout avec Table Suisse, c’est de sensibiliser le grand public à la problématique du gaspillage alimentaire, à l’importance de la redistribution, le tout en vivant une authentique expérience culinaire.

Comment se présente cette troi-sième édition?

Très bien, car ce sera vraiment une première suisse: à Lausanne, nous serons les premiers, sur 5 soirées, à faire venir 500 personnes nourries uniquement à partir de surplus alimentaires. En outre, afin d’élargir le public, nous avons décidé de rendre les soirées plus abordables en baissant le prix à 60 francs, boissons non alcoolisées comprises.

Ces soirées dégagent-elles des bénéfices?

Dans le meilleur des cas, nous tablons sur 10’000 francs cette année! Ces bénéfices seront reversés à l’opération Cœur à Cœur de la RTS qui œuvre en faveur des jeunes vivant dans la précarité. D’ailleurs, ce sont des jeunes du Semestre de motivation qui assureront le service.

Vous faites aussi de la politique. Ne craignez-vous pas que l’on voie dans ce projet des arrières-pensées électoralistes?

Franchement je le fais bénévolement, ainsi d’ailleurs que tous les partenaires impliqués dans le projet, y compris les chefs. Aussi bien Baptiste Marmier que moi-même y consacrons au moins 150 heures de travail. Alors, ce qui compte pour moi, c’est de faire une action positive qui soit en complète adéquation avec mes valeurs. Et puis, la problématique du gaspillage alimentaire n’est ni de droite ni de gauche, elle concerne tout le monde.

Soirées 2e Service du 19 au 23 décembre dès 19h au Cazard (Rue Pré-du-Marché 15, 1004 Lausanne). Réservation obligatoire sur le site www.2emeservice.ch

5 soirées 2e Service au Cazard

Les «Soirées 2e Service» ont pour objectif de sensibiliser la population au gaspillage alimentaire. Elles sont organisées en collaboration avec la fondation Table Suisse qui récupère dans les supermarchés suisses de la nourriture dont la date de vente est dépassée, mais pas la date de péremption. Les aliments récupérés sont donc tous comestibles. Le concept de ces soirées est simple: proposer un repas de 3 plats (entrée - plat principal - dessert) avec des produits récoltés uniquement par Table Suisse, soit des aliments initialement destinés à la poubelle. Ces 5 soirées auront lieu du 19 au 23 décembre au Cazard (Rue Pré-du-Marché 15, Lausanne) qui chaque soir accueillera 100 personnes pour un repas constitué avec les arrivages des jours précédents.

Réservation obligatoire: www.2emeservice.ch

1 a 2 tonnes par jour

Cruel paradoxe: en Suisse, 7% de la population vit sous le seuil de pauvreté, alors qu’environ 2 millions de tonnes de nourriture finissent chaque année à la poubelle. Dans le canton de Vaud, chaque jour Table Suisse collecte des aliments excédentaires d’une qualité irréprochable et les redistribue gratuitement à des institutions sociales. Et la quantité collectée laisse songeur: 1 tonne tous les jours, 2 tonnes durant la période des fêtes. Pour l’ensemble de la Suisse ce sont pas moins de 16 tonnes d’aliments récupérés d’une valeur annuelle de près de 27 millions de francs.

Rens. www.schweizertafel.ch/fr