«80’000 entreprises suisses pourraient être impactées par l’initiative»


L’initiative veut que les entreprises ayant un siège en Suisse veillent à ce que leurs activités commerciales respectent les normes environnementales. N’est-ce pas un paradoxe que vous en tant que vert libérale ne la souteniez pas?

Isabelle Chevalley: Les buts de l’initiative sont une évidence, mais l’initiative est inapplicable. C’est pour cela que je me suis engagée dès le départ pour que le Parlement fasse un contre-projet qui se situe parmi les plus hauts standards internationaux. Il maintient l’objectif de l’initiative sans ses défauts et en plus écarte ses impacts négatifs sur notre économie.

L’initiative vise aussi à ce que leurs activités commerciales respectent les droits humains. Le sort des enfants d’Afrique d’ailleurs ne vous concerne-t-il pas?
Si un enfant est dans un champ, c’est parce qu’il n’y a pas ou plus de place à l’école, pas d’argent pour payer les frais scolaires ou pas de certificat de naissance. C’est sur ces axes qu’il faut travailler, si on se soucie vraiment du sort de ces enfants. Punir une entreprise parce qu’il y a un enfant dans un champ ne permettra de construire aucune école… C’est un sujet complexe qui ne se résoudra pas en écrivant «oui» sur un bout de papier ici en Suisse.

Il semble que peu d’entreprises en particulier de PME suisses soient concernées. L’impact de cette initiative si elle était adoptée ne sera-t-il finalement pas marginal pour la place économique suisse?
C’est faux, le texte parle bien des entreprises et pas des multinationales comme essayent de nous faire croire les initiants. Il ne peut pas y avoir deux morales, une pour les PME et une pour les multinationales. Une étude Sotomos parle de 80’000 entreprises suisses potentiellement impactées, dont une majorité de PME actives dans des secteurs dits risqués.

Compter sur l’esprit de responsabilité des entreprises sans cadre juridique contraignant, n’est-ce pas illusoire?
Non, nos entreprises sont déjà très actives dans le terrain. Seules quelques-unes posent problème, et encore. On cite beaucoup Glencore: or une de ses filiales a bien été condamnée en Zambie. Cela démontre que nous n’avons pas à les mettre sous tutelle, ni à leur imposer nos lois.

Certains élus de droite soutiennent ce projet lancé d’ailleurs par Dick Marty. Comment l’expliquez-vous ?
Ils sont très minoritaires et la plupart sont des anciens élus. Ils n’ont pas participé au débat au Parlement et ils avaient soutenu cette initiative avant même de connaître le résultat du débat. Mais je relève que certains d’entre eux ont pris leurs distances aujourd’hui en considérant que la campagne moralisatrice des initiants n’était pas acceptable et parce que le contre-projet répondait à leurs attentes.