«La limitation de la vitesse à 40 km/h divise les risques par 10» Frédéric Revaz, porte-parole des CFF
Si vous habitez sur la ligne CFF Genève – Lausanne – Viège et que vous souhaitez continuer à dormir paisiblement, mieux vaut peut-être ne pas lire cet article… En effet, chaque nuit, des convois dits de «fret dangereux» traversent l’arc lémanique. A l’intérieur, divers produits chimiques: des hydrocarbures liquides, des hydrocarbures gazeux et des toxiques tels que le redouté et redoutable chlore. En 2021, 12'415 tonnes de ce gaz toxique ont circulé dans des «trains-entiers» entre Genève et Viège (VS) en passant par Lausanne, explique-t-on du côté de l’Office fédéral des transports. Au rythme d’un par semaine contre un par nuit voici une poignée d’années seulement.
Fatal à 1,6 km à la ronde
Si l’un de ces 198 wagons sécurisés de 120 m3 et 63 tonnes venait à dérailler et à se vider de son contenu, les spécialistes du bureau d'étude Securetude estiment que toutes les personnes se trouvant dans un rayon de 1’610 m aux alentours risqueraient une intoxication fatale. Même celles se trouvant à l'intérieur d’un bâtiment pourraient être touchées. 99% des gens se trouvant à l’extérieur à moins de 303 m de l’accident décéderaient alors en respirant les vapeurs de chlore. «Et environ 30% de ceux se trouvant dans un rayon de 2'500 m de “l’épicentre” aussi», rappelle Pascal Stofer, chef du secteur accidents majeurs pour le canton de Genève. Un cauchemar!
Les Verts, genevois notamment, aimeraient de longue date faire interdire ces convois. Le hic est que le chlore est utilisé pour confectionner de nombreux produits courants à l’instar des plastiques, des produits phytosanitaires ou des produits de nettoyage. Pour la plupart en provenance des régions lyonnaises et grenobloises, ils sont destinés aux usines chimiques valaisannes de Lonza à Viège et de Syngenta de Monthey. Lesquelles importent leur chlore de France (et dans une moindre mesure et plus récemment d’Italie) pour des raisons de coût alors qu’il était produit localement jusque dans les années 2000.
Accordons aux CFF, qui ne peuvent interdire ce genre de convoi, qu’ils ont beaucoup mis en œuvre pour en réduire la dangerosité. «La généralisation de la limitation de vitesse à 40km/h en 2018 a permis de diviser les risques par dix et l’utilisation de wagons par cinq», résume Frédéric Revaz, porte-parole de l’ex-régie fédérale. Ces wagons disposent d’une double épaisseur de paroi, d’amortisseurs, d’un dispositif anti-chevauchement et de tampons anti-crash. Les CFF ont aussi supprimé nombre d’obstacles situés le long des voies et susceptibles d’éventrer les wagons en cas de déraillement à l’instar de «rails-repères» verticaux devenus obsolètes.
Objectif 2025
Résultat: les risques ont été sensiblement diminués ces dernières années. Selon le dernier screening de l’Office fédéral des transports, en 2020, les risques étaient «acceptables» sur 97,3% du réseau ferré, dans le «domaine intermédiaire inférieur» sur 2,7% du réseau et dans le «domaine intermédiaire supérieur» sur moins de 0,1%, soit sur 1,8 kilomètre. «A Genève, Renens et Lausanne, 6 km de tronçons se situent encore dans ce que Berne appelle les risques «intermédiaires supérieurs». L’objectif d’ici 2025 est de se rapprocher au maximum du niveau dit acceptable», rappelle Pascal Stofer.