FORTA: quand les Verts vaudois font le grand écart

  • Les Verts sont le seul parti cantonal à s’opposer à FORTA, soumis à votation fédérale le 12 février.
  • De nombreux élus Verts, dont Daniel Brélaz, soutiennent pourtant le projet.
  • Décryptage d’un grand écart où la position de principe le dispute au calcul politique.

  • FORTA devrait permettre d’achever le réseau routier national et de réaliser des projets dans les agglomérations. VERISSIMO

    FORTA devrait permettre d’achever le réseau routier national et de réaliser des projets dans les agglomérations. VERISSIMO

«Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. Si Forta ne passe pas, de nombreux projets seront au congélateur»

Daniel Brélaz, Conseiller national Vert

Si seulement 2 votations avaient été organisées! Malheureusement il n’y en a qu’une et cela ne fait pas vraiment les affaires des Verts vaudois. Le 12 février prochain, le peuple suisse est appelé à se prononcer sur FORTA. Les électeurs devront en effet accepter ou refuser la création d’un fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération, qui servira à prendre la relève de l’ancien Fonds d’infrastructure. Ancré dans la constitution, FORTA permettra d’achever à la fois le réseau routier national et de réaliser des projets dans les agglomérations. Et c’est là que le bât blesse, car le projet pose un dilemme douloureux aux Verts, favorables aux projets d’agglomération et opposés au trafic routier. Conséquence: les Verts vaudois sont le seul parti cantonal à s’opposer à FORTA, tous les autres partis s’engageant résolument pour le fonds, y compris le PS vaudois qui n’hésite pas à aller à l’encontre de son parti national.

Pas une priorité

«Nous nous opposons à ce fonds pour deux raisons, explique Alberto Mocchi, le président des Verts vaudois. D’une part parce qu’il représente une trop forte ponction sur les finances fédérales au détriment de l’agriculture, de la recherche et, d’autre part parce qu’on estime qu’il faut plutôt encourager la mobilité douce et les transports en commun. Construire de nouvelles routes n’est pas une solution durable pour nos problèmes de mobilité. C’est donc bien le versant trafic routier qui nous dérange et bien entendu pas le financement des projets d’agglomération». Résultat: si la votation avait séparé les 2 objets, l’un pour les projets d’agglomération l’autre pour le trafic routier, l’attitude des Verts aurait été bien plus aisée: oui au premier et non au second.

«Le paquet étant global, il a bien fallu établir une priorité, explique Daniel Brélaz, ancien syndic de Lausanne et Conseiller national Vert qui lui, à l’inverse de son parti, s’engage résolument pour FORTA. Les personnes qui ont eu des expériences exécutives se sont prononcées en faveur de FORTA tandis que les militants de base qui craignent l’invasion de la route, et dont je respecte le point de vue, se sont prononcés contre». Signe de cette hésitation, le parti vaudois ne s’est prononcé qu’aux deux tiers contre FORTA, alors même que le parti suisse à rejeté le Fonds à une proportion bien supérieure. Reste que les Verts sont sur ce sujet bien seuls sur la scène cantonale et qu’en toute probabilité le peuple suisse se prononcera en faveur de FORTA.

Une votation difficile

«Ce sera en effet une votation très difficile à gagner confirme Alberto Mocchi. Mais le combat mérite d’être mené pour une question de principe, en tant qu’avocats de l’environnement, ceci d’autant que notre parti a souvent eu un rôle de précurseur et de vigile. Et puis l’ampleur du «non» pourra servir de signal pour le parlement fédéral qui saura ainsi qu’il n’aura pas un chèque en blanc ». Des arguments que ne retient pas Daniel Brélaz, pour qui les enjeux en termes de projets d’agglomération sont bien trop importants pour être joués à la roulette russe. «Si FORTA ne passe pas, explique-t-il, de nombreux projets risquent d’être mis au congélateur pour plusieurs années faute de financement. Dont de nombreux projets de mobilité douce, comme par exemple le M3, financé à 35-40% par la Confédération.»

Compromis difficile

Et d’ajouter: «FORTA a été le résultat d’un compromis difficile à obtenir dans un parlement fédéral dont ont connait la majorité. On peut craindre que ce sera bien pire s’il devait être renégocié dans le futur. Aussi bien mon choix que celui de mon parti sont respectables mais je préfère un tiens vaut mieux que deux tu l’auras.»

«Pour les Verts vaudois, et compte tenu du rapport de forces, FORTA ne représente en réalité pas un enjeu majeur, conclut un politologue. À l’approche des élections cantonales, il vaut donc mieux pour le parti de se profiler sur une question de principe qui mobilisera ses électeurs, plutôt que d’adopter une position pragmatique ».

Prendre la relève du fonds d'infrastructure

Afin de financer les projets de routes nationales et d’agglomération, le Conseil fédéral et le Parlement ont créé le fonds FORTA, inspiré de la solution retenue pour le rail. En Suisse, le trafic routier et d’agglomération augmente depuis en effet depuis des années, ayant doublé sur les routes nationales depuis 25 ans. FORTA servira donc à achever le réseau routier national, à faire sauter les goulets d’étranglement et à réaliser des projets dans les agglomérations. FORTA vient remplacer de manière pérenne le fonds d’infrastructure en vigueur depuis 2008, limité dans le temps et dont les moyens sont en grande partie déjà alloués.