Le tsunami Amazon menace les commerçants lausannois

L’arrivée imminente du géant américain en Suisse se précise.

Ce qui va changer? Des livraisons en 24 heures et un assortiment élargi.

Pour espérer survivre, les petits commerces misent sur la différenciation et l’accueil.

  • L’ouverture de l’antenne suisse d’Amazon va redistribuer les cartes du commerce lausannois. DR

    L’ouverture de l’antenne suisse d’Amazon va redistribuer les cartes du commerce lausannois. DR

<blockquote>«On se rassure en se disant que cela ne nous fait pas peur»</blockquote> Jérôme Dubois, cofondateur de Pépé Cassius

Quand on veut commander un produit sur Amazon depuis Lausanne, on est automatiquement redirigé vers la version française du site. Mais c’est bientôt fini. Prochainement, le géant américain du e-commerce lancera son antenne suisse. Avec pour conséquences des livraisons ultra-rapides et un catalogue nettement plus important, ceci grâce à un accord passé avec la poste. Ce qui fait bondir Pascal Vandenberghe, directeur général de Payot: «Le géant jaune veut faciliter la vie à Amazon pour livrer plus vite en Suisse. Cela m’étonne car il s’agit tout de même d’une entreprise publique, elle devrait plutôt se préoccuper de l’économie suisse. Car le géant américain ne paie pas d’impôts et ne crée aucun emploi dans notre pays.» Une attaque balayée d’un revers de la main par Masha Foursova, porte-parole de La Poste suisse: «Il est important de préciser que le contrat avec Amazon est une relation client standard et non un accord de coopération.» Avant de préciser: «Ce ne sont pas les frais d’expédition qui motivent des achats dans le monde entier, mais les prix attractifs des produits ainsi que le large éventail en ligne des fournisseurs étrangers.»

Inquiétude relative

Du côté des petits commerçants, cette arrivée imminente est toutefois vécue de manière relativement apaisée. Même si on commence à s’organiser: «On se rassure en se disant que cela ne nous fait pas peur, précise Jérôme Dubois, cofondateur de Pépé Cassius, un concept store pour hommes installé au Flon. Pour survivre, on propose des marques différentes et surtout un accueil personnalisé. On essaie aussi de s’aligner en termes de prix. Il y a aussi le projet de créer un label de magasins indépendants. L’union fait la force, c’est connu.»

Chez Payot, Pascal Vandenberghe fait preuve d’un flegme à toute épreuve: «Je ne suis pas inquiet. Chez Amazon, le livre n’est plus du tout stratégique. Ils ont toujours perdu de l’argent avec la vente de bouquins et cela représente moins de 10% de leur activité. Si Amazon devait nous tuer, cela ferait longtemps que nous serions morts.»

Concurrence déloyale

Au sein de la Fondation pour le commerce lausannois, on tend également à minimiser l’impact du raz-de-marée Amazon. Tout en attaquant frontalement la politique de La Poste suisse: «Cet accord est une forme de concurrence déloyale pour les commerçants car ils ne bénéficient pas des mêmes tarifs quand ils doivent envoyer leurs colis aux clients, tonne Helena Druey, secrétaire générale de la fondation. Quand les citoyens se rendront compte que le local est essentiel, ils changeront peut-être leurs réflexes d’achats afin de favoriser les boutiques qui forment des apprentis, paient leurs impôts et embauchent ici.» La secrétaire générale confirme que les commerçants lausannois fourbissent leurs armes pour faire face à cette prochaine venue du leader du e-commerce en terres helvétiques.

Comment? En soignant l’accueil en boutique tout en disposant d’un stock suffisant pour répondre immédiatement à la demande des clients. Tout en concédant: «Ce n’est pas encore suffisant, c’est pourquoi nous avons entamé des discussions avec des entrepreneurs afin de lancer une plateforme qui regrouperait les commerçants lausannois. Il faut rester optimiste car nous remarquons une tendance forte: un retour des clients dans les commerces de proximité.»