Mais que s’est-il passé au sein de la POL?

CRISE • Il y a deux ans, 9 assistants de la police de l’ouest lausannois quittaient leur poste soit par licenciement soit de leur plein gré. Deux ans plus tard, 7 d’entre eux ont réussi à retrouver ailleurs un poste similaire, un chiffre qui interroge.

  • Les anciens assistants de police de la POL subissaient-ils une pression pour «faire du chiffre»? ISTOCK

    Les anciens assistants de police de la POL subissaient-ils une pression pour «faire du chiffre»? ISTOCK

L’affaire avait défrayé la chronique au cœur de l’été 2018 et secoué le petit monde feutré de la police, en l’occurrence ici la POL, la police de l’ouest lausannois, en laissant à tout le monde un petit arrière-goût bien amer. Sur une équipe de 12 assistants de police, ceux dont la tâche principale est de délivrer des amendes d’ordre, 3 avaient été licenciés avec effet immédiat, et 7 avaient écopé d’un avertissement avec suspension des augmentations de salaire durant 1 année.

Principal grief retenu contre eux: des prestations insuffisantes au regard de leur cahier des charges, soit un manque de sérieux dans le respect des horaires de travail, et dans le rythme de leur délivrance d’amendes. En clair, plutôt des glandeurs que des agents sérieux.

L’affaire s’est soldée par la suite par d’une part le licenciement des 3 collaborateurs, mais aussi dans les semaines qui ont suivi, par les démissions successives de 6 membres de l’équipe. Etonnamment, aucune plainte ni dans un sens ni dans l’autre qu’il s’agisse d’une poursuite pénale contre les employés incriminés ou d’une dénonciation de l’employeur pour mobbing n’a été déposée.

Les langues se délient

Deux ans après, les langues se délient et 2 anciens employés ont accepté de témoigner, sous couvert de l’anonymat. «La vérité, c’est que nous avons été mobbés. Certes nous faisions des pauses et peut-être que certains d’entre nous en ont abusé. Mais tout de même j’ai personnellement rapporté aux alentours de 250’000 francs d’amendes par an, soit l’équivalent de 400 à 500 amendes par mois».

Et d’ajouter: «Malgré cela, on nous a convoqués, comme devant un tribunal pour nous voir exhiber un écran et nous dire: tel jour à telle heure, tu n’as mis que 5 amendes. Tel autre jour, pendant 2 heures 30 tu n’as rien amendé, que faisais-tu? Du jour au lendemain, alors que jusque-là on ne m’avait jamais rien reproché, on m’a mis une pression incroyable sur le nombre d’amendes et c’était vraiment inexplicable!»

Contactée, la POL ne souhaite pas revenir sur ce sujet: «Pour la POL, cette affaire, qui date de 2018 est classée et, au surplus, aucune demande n’est parvenue au Tribunal des prud’hommes» observe ainsi sa chargée de communication Alicia Nigro. Qui ajoute cependant:« Notre pratique de management n’a pas été modifiée, la POL va de l’avant et conserve toute sa confiance envers l’ensemble de ses collaborateurs.»

Pourtant certains chiffres interpellent: selon notre décompte, sur les 9 collaborateurs qui ont perdu leur poste soit par licenciement, soit par départ volontaire, pas moins de 7 ont retrouvé un travail, en donnant entière satisfaction, et ce pour le même cahier des charges qu’à la POL, voire même avec des responsabilités plus élevées, soit au sein d’autres corps de police en Suisse soit dans des communes.

Plein succès

«Personnellement j’ai retrouvé du travail très vite après être parti volontairement, témoigne ainsi un autre ancien assistant de police. Et franchement, je n’ai pas l’once d’un regret, même mes amis me disent que je suis métamorphosé: je suis un homme heureux je ne vais plus travailler la boule à l’estomac.»

Très diplomatiquement, la POL affirme «se réjouir de cette issue» pour les employés qui ont quitté ses rangs, tout en « leur souhaitant plein succès dans leur nouvelle activité». Elle a quant à elle quasiment finalisé le processus de remplacement des ASP manquants, puisqu’il ne reste dans ses rangs qu’un seul poste vacant et «pour lequel la procédure d’engagement est en voie de finalisation».

Charaf Abdessemed