SPECIAL VOTATIONS DU 27 SEPTEMBRE - Nouvelle loi sur la chasse: leurre ou réel besoin?

Le 27 septembre, pas moins de cinq objets sont au programme du premier scrutin fédéral organisé depuis le début de la crise du coronavirus. Un référendum a été lancé contre la futre loi fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages.

Philipe Duperrez, partisan de la loi  fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages et Alberto Mochhi qui s'y oppose s'affrontent ici.

Philippe Duperrex, président du comité de campagne pour le «oui»: «Cette loi répond aux besoins actuels»

Lausanne Cités :Quels sont les deux arguments majeurs qui devraient, à vos yeux, inciter le peuple suisse à voter «oui» à cette nouvelle loi?
Philippe Duperrex: Cette loi doit être modernisée afin de répondre aux besoins actuels, et elle renforce vraiment la protection de la nature et de la faune.

En quoi la renforce-t-elle?
Des moyens financiers supplémentaires sont accordés pour la protection de la faune et de la flore.

Pour les opposants, ce texte de loi est inacceptable parce qu’il affaiblit considérablement la protection des espèces. Que leur répondez-vous?
Les référendaires inondent le pays avec de faux arguments, à la limite du risible tant ces derniers sont irrationnels, par exemple que le chasseur pourra chasser l’aigle royal et le castor. Ce qui est certain, c’est que la loi assure la protection des espèces et qu’il n’est nullement question de réguler le lynx, le castor ou encore le cygne.

Le sort du loup, de plus en plus présent sur le territoire suisse, apparaît comme étant la véritable pierre d’achoppement de cette révision. Et pour vous, elle permet justement une solution pragmatique pour aménager une cohabitation durable entre l’homme et le loup. Expliquez-nous…
La loi date de 1985. A cette époque les loups n’étaient pas présents chez nous. Actuellement, de nombreuses attaques cruelles et sauvages ont lieu dans notre canton. Cette loi permet aux cantons de réguler la population de loups, par les gardes-faune, tout en maintenant cette espèce protégée.

Vous parlez de régulation, vos adversaires d’abattage. Ils disent que la régulation, c’est une porte ouverte à tous les excès…
Le terme «abattage» est erroné, mais il fait partie du vocabulaire mensonger des référendaires. Tout chasseur suit une formation stricte et exigeante, et c’est avec un grand respect de l’animal et un sens de l’éthique renforcé que la chasse est pratiquée.

Autre reproche que l’on vous fait, c’est que cette loi transfère compétence et autonomie aux cantons. Or, la faune ne connaît pas de frontière. Pourquoi dès lors instaurer des différences entre les cantons de Vaud et Zurich?
Votre exemple est flagrant. Le territoire du canton de Vaud est étendu et très diversifié. Il ne peut être comparé à Zurich. C’est pourquoi les particularités régionales doivent être prises en compte.

Si les partisans du «non» devaient l’emporter, quelles conséquences cela aurait-il pour les chasseurs?
On n’envisage bien entendu pas ce scénario, mais si tel devait être le cas, un effort important devra être fait par les chasseurs, pour mieux expliquer et communiquer sur le rationnel lié à la chasse

Alberto Mocchi, président des Verts vaudois et partisan du "non": «Les espèces se régulent entre elles»

Lausanne Cités: Cette loi sur la chasse, vous n’en voulez pas. Or, la brochure du Conseil fédéral dit clairement qu’elle renforce la protection de la faune sauvage. Vous, l’écologiste, ce n’est-ce que vous voulez?
Alberto Mocchi: oui, et c’est pour cela que je milite pour le «non». Si les associations de protection de l’environnement et les partis écologistes s’y opposent, c’est qu’elle n’est pas si bonne que cela pour la biodiversité…

Est-ce que vous iriez dès lors jusqu’à dire qu’elle est mensongère et que, dans le fond, cette nouvelle loi n’est que la résultante d’un processus législatif bâclé?
Cette révision facilite le tir d’espèces protégées, même à «titre préventif», donc avant même qu’elles aient commis des dégâts, et permettra au Conseil fédéral de placer toutes sortes d’espèces menacées sur la liste de celles pouvant être tirées. Disons donc que j’ai une autre interprétation que les auteurs de la brochure quant à ses bienfaits pour la nature.

Si on y regarde de plus près, elle contient pourtant toute une série de nouvelles protections pour certaines espèces, comme des périodes de tirs limitées par exemple. C’est plutôt positif, non?
Ce sont de timides avancées, qui ne sauraient compenser les grands pas en arrière décrits ci-dessus. Surtout, on a omis de protéger des espèces comme le lièvre brun ou le tétras-lyre, en voie de disparition chez nous, et qui pourront continuer à être chassées.

Le problème central, c’est celui du loup. Il est là. Il se rapproche des zones habitées. Et les partisans de la loi estiment qu’elle leur permettra de lui faire comprendre où sont ses limites puisqu’elle assouplit ses conditions d’abattage….
La loi actuelle permet déjà de réguler les populations de loups et de tirer des individus qui constituent un danger.

Mais est-ce que vous comprenez l’exaspération des bergers ou paysans de montagne qui doivent faire face à de nombreuses attaques… on parle aujourd’hui d’une centaine de loups en Suisse…
Les paysans de montagne font un travail dur et souvent ingrat. Je comprends leurs inquiétudes et on doit les soutenir, mais en les aidant à mieux protéger leurs troupeaux.

Le message que vous voulez faire passer consiste donc à dire que la nature a besoin de toutes les espèces...
Et qu’elles se régulent entre elles. Le loup est par exemple le seul prédateur des sangliers en Suisse, et les dégâts engendrés par ces derniers à l’agriculture se chiffrent en millions de francs.

In fine, vous souhaitez un «non» dans les urnes, et quoi ensuite? Que le  parlement fédéral se remette à l’ouvrage?
Nous souhaitons que les Chambres revoient cette loi, et l’adaptent aux réels enjeux actuels en matière de protection de la biodiversité.