A la place de l'Ours, un nostalgique de la ligne 5

Chaque semaine, Lausanne Cités en collaboration avec l’équipe du livre «Une journée à Lausanne» et les éditions Favre vous proposent deux photographies d’un même lieu à Lausanne, hier et aujourd’hui, accompagnées d’une anecdote y relative. Aujourd’hui, la place de l’Ours.

  • GEOFFREY COTTENCEAU

    GEOFFREY COTTENCEAU

Chère ligne 5, j’avais 18 ans quand tu es partie et que tu m’as laissé sur le trottoir. C’est clair que le métro m2 qui t’a remplacé me fait gagner un sacré paquet de temps, à moi plus encore qu’à bien d’autres, car j’habite à Vers-chez-les-Blanc, petit village dans les hauts de la commune de Lausanne. Malgré cela, j’avoue te regretter. Tu étais beaucoup plus lent, c’est vrai. Il n’était pas rare que tu te fasses doubler par les piétons, tout particulièrement vers le tronçon CHUV – Sallaz que tu mettais parfois près de vingt minutes à parcourir. Mais voilà, on pouvait toujours rêvasser et regarder la vie urbaine, toujours en mouvement, au travers de tes fenêtres…

Aujourd’hui, je me tape le trajet en métro entre 500 et 600 fois dans l’année, et j’avoue en avoir marre. Je n’éprouve vraiment aucune envie d’entrer dans ce long tunnel. Privé de vue pendant l’essentiel du trajet, il ne me reste plus qu’à observer les autres passagers, dont 4 sur 5 au moins gardent leurs yeux rivés sur leur mobile, spectacle tout de suite lassant. Le plus souvent, je craque moi aussi très vite et je fais le tour des derniers articles d’Eurosport ou me lance encore plus bêtement dans un scroll Facebook, non sans culpabiliser, car ce sont là des secondes de vie tout à fait perdues.

Reste qu’il est quand même bien plus facile de laisser errer son regard et son esprit au travers des fenêtres lorsqu’elles donnent sur autre chose que des murs gris qui défilent!

Lucien Duran, 2017