Broulis: une gestion de crise désastreuse

POLITIQUE • Avec l’affaire des déductions fiscales, le Conseiller d’Etat a fait preuve d’une gestion médiatique de crise confondante. Retour sur trois semaines d’improvisation.

  •  Pascal Broulis, au cœur de la tempête depuis 3 semaines. VERISSIMO

    Pascal Broulis, au cœur de la tempête depuis 3 semaines. VERISSIMO

Il est l’auteur, reconnu et aujourd’hui moqué, de «L’impôt heureux». Il aurait pu être sans rougir, également l’auteur de la «Communication malheureuse». Car au-delà du fond de l’affaire - le Conseiller d’Etat a-t-il procédé à une malencontreuse «optimisation fiscale» -, émerge en termes de communication, une incroyable improvisation, et le mot est faible, de la part d’un élu amoureux des médias et jusqu’à présent rompu à l’art de l’interaction médiatique.

Dans Le Matin Dimanche de cette semaine, le Conseiller d’Etat a enfin, après deux semaines de refus et d’hésitation, s’abritant derrière une primeur qu’il souhaitait réserver au parlement, consenti à livrer une interview-vérité dans laquelle il s’explique enfin.

Tardif mea culpa

Plus ou moins réussi, l’exercice illustre ce que Pascal Broulis aurait dû faire dès le déclenchement de la tempête médiatique, il y a trois semaines lorsque le Tages Anzeiger l’accusait de bénéficier d’un arrangement lui permettant d’économiser en répartissant ses impôts sur deux communes, Lausanne et Sainte-Croix. Au lieu de s’expliquer, voire même à esquisser d’emblée le tardif mea culpa qu’il a fini par consentir du bout des lèvres à nos confrères du Matin Dimanche, ce qui aurait plus ou moins clôt la polémique, le Conseiller d’Etat a préférer se murer dans un silence désastreux. Résultat: un vide de bien mauvais aloi face aux révélations en cascade qui ont suivi, alors que pas un des ténors du PLR vaudois n’a tenté le moindre soutien en sa faveur. Et c’est du côté des instances officielles du PLR vaudois qu’est venu un soutien, par l’intermédiaire d’un communiqué signé de son comité et aux accents surréalistes, dans une grande tradition complotiste digne des meilleures années de l’ère soviétique, incriminant... les médias. «Il y a peu, c’était le Conseiller aux Etats PLR Olivier Français qui était soupçonné par le même journaliste (Ndlr, Philippe Reichen, auteur du premier article dans le Tages Anzeiger), puis le Conseiller d’Etat Pascal Broulis et aujourd’hui la Conseillère nationale Isabelle Moret», peut-on ainsi y lire. «Pour le PLR Vaud, ces articles du grand quotidien suisse alémanique s’apparentent à une cabale sans nuance à son encontre. Les propos publiés ont ensuite été repris servilement par d’autres quotidiens romands».

Jalousie alémanique?

La faute au médias donc, une thèse classique qui a tenu jusqu’à ce dimanche, avant que le Conseiller d’Etat ne pointe du doigt, dans Le Matin Dimanche, un autre coupable, tout aussi désigné: les Zurichois, jaloux du succès économique vaudois: «Peut-être que du côté alémanique, on trouve que le canton de Vaud va trop bien, il est triple A, pas endetté» a ainsi lâché, sans rire l’ancien président du Conseil d’Etat.

Manque de chance, Philippe Reichen, le journaliste incriminé, s’est aussitôt fendu de deux tweets de clarification sur le célèbre réseau social: «Ce n’était certainement pas ça la raison, a-t-il publié tôt ce dimanche. Pascal Broulis sait pourquoi j’ai commencé la recherche. Un juge fédéral a dû expliquer devant un tribunal que son centre de vie n’est pas Lausanne. Le grand argentier dit que son centre de vie est à Sainte-Croix, (alors) qu’il vit à Lausanne. Absence d’égalité!»

Dès lors que ni les médias, ni les Alémaniques ne peuvent en réalité être incriminés, reste à se demander qui est finalement responsable de ce qui restera sans aucun doute un incontestable fiasco à la vaudoise.