«Escroquerie ou comptabilité créative? L’enquête tranchera»

SCANDALE DE BEAULIEU • Syndic de Lausanne jusqu’en 2016, Daniel Brélaz explique pourquoi la surveillance de la Fondation a failli.

  •  Daniel Brélaz, syndic de Lausanne de 2001 à 2016. verissimo

    Daniel Brélaz, syndic de Lausanne de 2001 à 2016. verissimo

L’actuel syndic de Lausanne a affirmé dans nos colonnes qu’il ne peut pas expliquer ce qui s’est passé à Beaulieu avant son arrivée en 2016...

Effectivement, c’est difficile, car il faut remonter loin dans le passé pour comprendre comment les choses se sont déroulées. Dès les années 1920, Beaulieu était gérée par une coopérative qui fonctionnait bien tant que le Comptoir fonctionnait bien et dégageait des bénéfices. Au fil du temps, cette coopérative a toujours fonctionné par un système d’adjudication plutôt que par des procédures d’appels d’offre comme on les connaît aujourd’hui.

Quand les problèmes ont-il commencé?

Dès le début des années 70, Beaulieu a commencé à vieillir, alors que le Comptoir n’apportait plus autant d’argent. L’entretien n’étant pas fait de manière optimale, les autorités communales et cantonales ont décidé au début des années 90, d’investir environ 80 millions de francs, 33 pour la ville 30 pour le canton et 10 pour Région Lausanne. Le problème c’est que cet argent, au lieu de servir à investir, a été utilisé pour combler les déficits et seuls 15 millions ont été injectés dans le site, et encore pour l’entretien et pas vraiment pour la modernisation.

En 2000, vous devenez syndic...

Oui, et Jean-Claude Mermoud est alors conseiller d’Etat. Tous les deux, croyant à la vocation économique de Beaulieu, avons cherché un partenaire solide et ce fut MCH qui a subordonné sa venue à la construction des Halles Sud. Après des débats complexes et délicats tant au Conseil communal qu’au Grand Conseil, les autorités ont consenti une fois de plus un versement d’environ une cinquantaine de millions. Le hic, c’est que la gestion de MCH n’a pas cessé de se planter dans une gestion hasardeuse, usant au passage deux générations de dirigeants qui ont accumulé les déficits. Cependant, les Halles Sud sont faites malgré 56 millions de déficits et une situation financière plus tendue que jamais.

Quel rôle joue M. Porchet à ce moment-là?

Il est simple secrétaire du Conseil de fondation de Beaulieu, sur la base d’un mandat. Pendant la période 2002-2014, il gérait essentiellement des contrats d’entretien. Il a peut-être fait de la comptabilité créative pour camoufler les déficits, ou recouru à ses amis sans appels d’offres, mais même avec cela, il me semble difficile d’arriver à la somme de 27 millions évoquées.

Les choses se compliquent donc par la suite?

Oui à partir de 2013-2014, les choses deviennent en effet plus dangereuses, car plusieurs événements se produisent. La Ville décide de sauver le théâtre, les négociations sont engagées pour la venue de la Source et le Tribunal arbitral du sport. On entre donc dans une période d’investissements plus importants. C’est à ce moment là qu’il aurait fallu changer de structure de gestion. Mais cela aurait coûté quelques centaines de milliers de francs et le Conseil de fondation, exsangue financièrement, ne savait pas où prendre l’argent nécessaire à la mise en place d’une structure professionnelle. Aussi bien le Conseil communal que le Canton auraient dit niet, alors que tout le monde disait «Beaulieu c’est l’avenir»! D’ailleurs si on a réussi le théâtre c’est uniquement parce qu’on a pu en montrer l’usage et que le Conseil communal tenait à une politique culturelle.

Qui d des accusations portées contre M. Porchet?

Je n’ai pas lu le rapport de révision. Sommes-nous en présence d’une escroquerie ou est-ce que M. Porchet a fait une comptabilité créative pour camoufler les déficits? Je ne peux rien dire, tant que l’enquête n’a pas livré ses résultats. Celle-ci aura le mérite d’éclaircir les responsabilités.