Grégoire Junod: «La crise nous a imposé d’agir avec solidarité et résilience»

BILAN DE LÉGISLATURE • A l’aube des élections communales de 2021, la Municipalité tire un bilan sur la législature 2016-2021. Avec le sentiment du devoir accompli. Entretien avec le syndic Grégoire Junod.

  • Grégoire Junod déplore que les villes ne soient pas associées aux décisions. VERISSIMO

    Grégoire Junod déplore que les villes ne soient pas associées aux décisions. VERISSIMO

Lausanne Cités: En 2016, lors de la présentation de votre programme de législature, vous notiez que Lausanne était alors engagée dans une mutation profonde. Les enjeux de la politique communale que vous entendiez mener tournaient autour de trois axes. Le premier concernait les transports publics. Quel bilan tirez-vous à ce sujet?

Grégoire Junod: Les tl ont poursuivi leur développement. Le chantier du LEB avance bien, les financements du m3 sont assurés et les travaux de la gare de Lausanne pourront bientôt démarrer. Avec le déblocage du dossier du tram et l’abandon de la rampe Vigie-Gonin, on peut dire que les feux sont au vert. Après, comme pour tous les grands chantiers, on souhaiterait toujours pouvoir aller plus vite.

Avec la volonté de poursuivre leur développement lors de la prochaine législature?

Certainement, ne serait-ce que pour mener à bout les projets engagés et tenir les engagements de notre stratégie climatique. Je souhaite aussi que nous avancions sur la baisse des tarifs des transports publics. Aujourd’hui, Lausanne offre des abonnements à moitié prix pour les 11-20 ans. Cette mesure devra être étendue aux jeunes en formation jusqu’à 25 ans mais aussi aux retraités. Ceci afin de favoriser l’usage des transports publics et soutenir aussi le pouvoir d’achat des aînés dont le revenu est souvent modeste. Aujourd’hui, l’abonnement Mobilis senior coûte 670 francs par année. Nous proposons qu’il soit abaissé à 335 francs et rendu gratuit pour les bénéficiaires de prestations complémentaires AVS-AI.

Le deuxième point concernait la mobilité douce…Une approche parfois contestée, non pas sur sa finalité, mais sur la manière dont elle a été imposée dans certains cas. Je pense ici tout particulièrement à la mise en place des pistes cyclables en ville et le rétropédalage que cela a nécessité…

Dans tous les quartiers, la population nous réclame moins de trafic pour améliorer la qualité de vie, réduire le bruit et la pollution. C’est ce que nous faisons avec la création de nouvelles zones 30km/h et de zones de rencontres, avec l’élargissement des terrasses de cafés et la création de nouvelles pistes cyclables. Comme toujours lorsque l’on touche à la voiture, cela crée forcément des tensions. Mais la Ville a aussi montré qu’elle demeurait ouverte au dialogue, prête à procéder à des ajustements si nécessaire, comme à Ouchy par exemple.

Troisième point, le logement et les infrastructures. Plusieurs grands chantiers ont abouti, mais non sans mal parfois. Sur ce point des critiques sont apparues, déclenchant la polémique. Je pense notamment à la gestion plutôt chaotique du Centre Sportif de Malley ou au retard pris dans la construction de l’écoquartier des Plaines-du-Loup….

En cinq ans, nous avons sorti de terre le quartier des Fiches, les immeubles des Falaises ou de Sévelin, pour ne citer que les projets les plus importants, nous avons construit une nouvelle patinoire et un stade. Enfin les Plaines-du-Loup sont en chantier. Connaissez-vous beaucoup de villes qui ont autant investi pour le logement et le sport en si peu de temps? Franchement, je ne comprends pas les critiques du PLR sur ce point, si ce n’est pour relever ce que tout le monde sait, à savoir que les grands projets prennent du temps, suscitent parfois des oppositions ou des difficultés. Nous en avons connu et nous en connaîtrons encore. Le seul moyen de s’en prémunir totalement serait de ne plus rien faire du tout et de renoncer à tout projet. Ce n’est pas ma conception du développement de Lausanne.

Le PLR qui, globalement, dresse un bilan catastrophique de cette législature. Au-delà de la posture politicienne, n’y a-t-il rien de juste dans ses attaques?

On peut toujours faire mieux et en ce sens la critique est à la fois normale et positive. Elle nous permet d’avancer. Mais il y a un réel décalage aujourd’hui entre la bonne entente au sein du collège municipal, y compris avec Pierre-Antoine Hilbrand, le bon travail que nous avons aussi pu initier avec les milieux économiques sur les mesures de soutien en cette période de pandémie et le ton utilisé par le PLR. J’ai parfois l’impression que nous ne vivons pas dans la même ville.

Cela dit, quels sont à vos yeux, et sans entrer dans les détails, les autres secteurs que vous considérez comme des réussites de la Ville depuis 2016?

L’augmentation de l’offre de places en garderie, la lutte contre le deal de rue, le retour à l’emploi et la baisse des bénéficiaires de l’aide sociale, les mesures décidées en faveur de l’égalité, pour une meilleure représentation des femmes dans l’espace public et contre le harcèlement de rue.

Début 2002, juste après les Jeux Olympiques de la Jeunesse, la crise sanitaire s’est installée. Elle n’est de loin pas terminée. Quelles conséquences a-t-elle eue sur la mise en place de votre politique?

Elle nous a imposé d’agir avec solidarité et résilience, de nous adapter rapidement pour soutenir les plus vulnérables et engager des politiques de soutien, en faveur des personnes seules, des sans-abris, des commerçants, du monde de la culture et du sport, du tourisme… Et nous devrons continuer, car la crise est loin d’être terminée.

On a toutefois eu un sentiment de flottement. Les villes sont-elles armées pour faire face à ce genre de menaces?

La gestion de la pandémie est très difficile et je ne veux jeter la pierre à personne mais la multiplication des décisions fédérales et cantonales et les incohérences qui en découlent nécessairement – on ouvre les stations de ski mais on ferme les théâtres et les cinémas par exemple – sont parfois difficiles à suivre, d’abord pour les acteurs concernés mais aussi pour les villes. Je déplore d’ailleurs que les villes, qui sont en première ligne, ne soient associées à aucune décision.

Dernière chose, les futures élections s’annoncent disputées. Franchement, une Municipalité moins hégémonique à gauche ne serait-elle pas in fine la garantie d’une meilleure gouvernance?

C’est évidemment le peuple qui décidera. Je constate néanmoins que la Municipalité, dans son équilibre actuel, fonctionne bien, que nous n’avons connu aucune rupture de collégialité et sommes restés soudés, y compris dans les moments difficiles. Avec quatre partis représentés au sein du collège municipal, nous avons un large spectre d’opinions différentes qui y sont représentées, très loin de l’idée d’un monobloc de six contre un seul minoritaire.