L’aéroport de la Blécherette fait (encore) polémique

La Municipalité vient de répondre à une pétition et un postulat demandant la réduction des nuisances dues aux avions qui décollent de la Blécherette. Les mesures prévues demeurent toutefois nettement insuffisantes pour les riverains.

  • Les riverains de l’aéroport estiment qu’il génère encore beaucoup trop de nuisances. CCHE

    Les riverains de l’aéroport estiment qu’il génère encore beaucoup trop de nuisances. CCHE

«Au début, nous avions beaucoup de peine avec le bruit des avions. Maintenant, après 19 ans ici, on s’est habitués. Mais quand même, certains avions font un bruit horrible et ils volent très bas!» Claire-Lise habite dans le secteur de Boisy-Pierrefleur. Dans ces quartiers, les habitants sont particulièrement exposés aux bruits des avions qui décollent vers le Sud. A juste titre: les mesures effectuées dans le cadre du rapport-préavis municipal montrent que sur un balcon au chemin de Pierrefleur, le bruit dû au passage d’un avion monte jusqu’à 87 décibels. D’où «une gêne effective» justifiant la mise en place de mesures spécifiques.

Le 18 avril dernier, sur cette base, l’Exécutif lausannois a donc transmis au Conseil communal son nouveau rapport pour approbation. Le précédent, rédigé sous l’ancienne législature, avait lui été annulé et repris pour être complété en 2017.

Des points positifs

Mais après en avoir pris connaissance, les membres de l’Association de défense des riverains de la Blécherette (ADRB) sont loin d’être satisfaits. «C’est un tout petit premier pas», réagit Alain Faucherre, membre fondateur de l’ADRB. «Mais le protocole d’accord entre la Commune et l’Aéroport de la Blécherette passe à côté de gros problèmes.»

L’un d’eux est qu’il n’est fait aucune mention des écoles de pilotages alors qu’il s’agirait d’un point problématique central relevé par toutes les personnes interrogées. «Il y a des points positifs dans les mesures qui ont été prises, comme le fait de limiter le nombre de décollages vers le Sud, donc au-dessus de la ville, qui ont fortement augmenté ces dix dernières années. Mais je reste critique. On aurait pu en faire bien davantage. Déplacer les cours de pilotage à la campagne aurait été une solution», complète Hadrien Buclin, conseiller communal à l’origine du postulat déposé en 2016.

Supprimer les cours de pilotage?

Les statistiques montrent en effet que les vols d’écolage représentent 37% des déplacements au départ de la Blécherette pour les avions, et 27% pour les hélicoptères. Or, des pilotes qui apprennent «font des demi-tours, repassent plusieurs fois au même endroit…» raconte Alain Faucherre. Egalement membre fondatrice de l’ADRB, Christine Von Garnier revendique aussi la suppression des avions-école de la Blécherette. «On ne peut pas voler des heures sur la ville… Je vois les avions raser les toits. L’autre jour, à partir de 16 heures, au moins trois nous sont passés sur la tête.»

Dans le protocole d’accord signé par la Municipalité et l’Aéroport, ce dernier s’engage à encourager le choix d’aéronefs moins bruyants et moins polluants par des outils financiers incitatifs. Dans un délai d’une année et demi, l’Aéroport devrait ainsi mettre en place un système de surcharges financières pour les aéronefs les plus bruyants et d’allègements financiers pour la flotte électrique. Mais les montants sont inconnus et Alain Faucherre craint que les sommes ne soient pas assez incitatives.

Aéroport remis en question

Au-delà du bruit et de la pollution, c’est l’existence même d’un aéroport en pleine ville qui est remise en question, notamment par soucis de sécurité et de bien-être des habitants. En 1992, la population lausannoise avait été invitée à se rendre aux urnes pour s’exprimer sur le maintien de l’aéroport de la Blécherette. A 60%, elle avait souhaité maintenir la structure. Ce que les statistiques ne disent pas en revanche, c’est qu’à l’époque, un projet de quartier était en discussion sur le territoire occupé par l’aérodrome. Quelque peu effrayés par l’ampleur du quartier projeté, les Lausannois, en votant pour l’aéroport, avaient en réalité dit non à une densification excessive. «On a manqué le coche. Maintenant nous avons toujours les avions et nous avons quand même les nouveaux quartiers», conclut Claire-Lise.