Les Lausannois champions de la mobilité active

PANDÉMIE • A Lausanne, la pandémie a fortement marqué les usages en matière de mobilité. Ainsi l’année dernière, la mobilité dite active s’est renforcée alors que la fréquentation des transports publics et le trafic automobile ont diminué.

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L’Observatoire de la mobilité, à Lausanne, c’est un recueil des principaux chiffres en matière d’habitudes de mobilité et d’usages de l’espace public. C’est également un outil pour suivre la mise en œuvre des objectifs que s’est donnés la Ville dans ces domaines. Sans surprise, cette édition 2020 a été fortement marquée par la pandémie en cours, avec des conséquences clairement visibles.

Une baisse parallèle

Ainsi dès le mois de mars 2020, les transports publics de la ville ont été moins utilisés alors que leur fréquentation était pourtant en augmentation au tout début de l’année encore. Elle est descendue drastiquement lors du premier semi-confinement avec une baisse de 16% de la fréquentation par rapport à 2019, une baisse qui n’a jamais été rattrappée. Le constat est identique en ce qui concerne le trafic automobile. Le semi-confinement s’est fait sentir sur tous les points d’entrées de la ville puisque les compteurs ont relevé des baisses d’environ 50% du trafic entre avril 2019 et avril 2020. La même comparaison au mois de septembre relève une diminution du trafic d’environ 3%. Tout cela au profit de la mobilité dite active, soit les piétons et les cyclistes. A titre d’exemple, le nombre de cyclistes a augmenté de 20% entre 2019 et 2020.

Apaiser et fluidifier le trafic

«Ces chiffres démontrent qu’il était crucial d’accompagner les changements d’usages en matière de mobilité», souligne Florence Germond, conseillère municipale en charge de la mobilité et des espaces publics. «Rendre l’espace public plus accessible, plus apaisé et plus convivial est un défi passionnant. Pour y arriver, développer une mobilité plus durable est un enjeu majeur auquel la Municipalité s’attelle chaque jour.»

Développer la mobilité active

Afin de favoriser la mobilité active, bénéfique pour la santé, et la lutte contre la pollution de l’air, la Ville va donc poursuive la politique engagée ces dernières années. Le développement des zones modérées va se poursuivre. Lausanne compte désormais 86 kilomètres de zones modérées sur le total de voirie hors axes principaux (138 km), soit le 62%. L’effort sera donc poursuivi ces prochaines années (lire encadré ci-dessous). Par ailleurs, afin de faire cohabiter plus efficacement marche et trafic automobile, la Municipalité a supprimé les feux de 9 carrefours et mis au clignotant certains carrefours la nuit (19 en 2020).

Plus de pistes cyclables

Le développement des aménagements cyclables va aussi se poursuivre, venant renforcer les 10.5 kilomètres d’aménagement et de liaisons cyclables créées jusqu’à présent et portant le total à plus de 111 kilomètres. Afin de sécuriser la marche et de la rendre plus attractive enfin, 15 aménagements pour sécuriser le chemin de l’école ont été déployés, 127 nouvelles assises installées et 20 mesures d’accessibilité, comme l’abaissement de trottoirs et l’installation de bande podotactiles, ont été mises en place. Enfin, 78 passages piétons ont été modifiés pour permettre l’annonce automatique.

De la place pour les voitures

Les chiffres de l’Observatoire de la mobilité précisent par ailleurs que la place dévolue à la voiture dans les espaces publics de la ville n’a pas beaucoup diminué. Ses 96’400 places de stationnement, dont 28’810 sont à usage public, représentent près de 480 fois la place de la Riponne. Les mesures mises en place par la Municipalité pour accompagner les effets de la pandémie n’ont touché que 2% de ces places. Elles ont par contre permis de dégager de l’espace pour agrandir les terrasses des restaurateurs particulièrement touchés par la crise, de développer plus rapidement les aménagements cyclables prévus de longue date et de favoriser ainsi la mobilité active.

Dix nouvelles zones modérées

Une dizaine de nouvelles zones modérées vont être aménagées en ville d’ici 2023. But poursuivi: réduire les nuisances sonores tout en améliorant la convivialité et la sécurité dans les quartiers. Seront concernés ceux qui présentent un niveau sonore trop élevé. Soit l’avenue des Acacias, l’avenue de Cour ouest, le chemin de Bellevue, l’avenue Dapples, l’avenue du Temple, l’avenue Druey, l’avenue de France ouest, la route du Pavement sud, l’avenue Marc-Dufour sud, et l’avenue de l’Avant-Poste. La Ville tiendra compte du retour et du souhait des habitants, pour décider s’il s’agira de zones 30 ou de zones de rencontre, dans lesquelles la vitesse est limitée à 20 km/h. Ces aménagements seront des compléments aux autres mesures de lutte contre le bruit routier, comme la pose de revêtements phonoabsorbant et la généralisation de la limitation à 30 km/h sur l’ensemble du territoire communal la nuit.

Un véritable puits de réflexion, l'éditorial de Philippe Kottelat

Depuis plus d’un an, le Covid-19 bouleverse notre quotidien et nous oblige, bon an mal an, à réinventer nos vies et nos rapports sociaux. Mais que restera-t-il de cette pandémie une fois le virus maîtrisé? Quels enseignements tirerons-nous de cette crise sanitaire? La question est sur beaucoup de lèvres, avec le secret espoir pour certains que le retour à la case départ se fasse sans changements notoires, alors que pour d’autres il devrait être l’amorce de modifications fondamentales dans notre façon de vivre en société.

L’histoire passée nous enseigne que les pandémies qui ont déferlé sur la planète ont quasi toutes apporté des solutions différentes à la vie alors en cours. Le choléra, en Grande-Bretagne dans les années 1830, a vu Londres mettre en place un système d’égouts. La tuberculose, au début du XXe siècle, a contribué au développement de l’architecture moderne avec ses murs blancs, ses grandes fenêtres et ses piliers pour surélever les maisons par rapport au sol où les maladies se développaient. Au début des années 2000, l’épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère, le fameux SRAS, a poussé Singapour à moderniser ses infrastructures médicales, ce qui a été essentiel pour que la ville-Etat puisse réagir efficacement au nouveau coronavirus.

En une seule année, et à un moindre niveau, Lausanne a ainsi fortement modifié ses usages en matière de mobilité, voyant la mobilité dite active être renforcée aux dépens des transports publics et des voitures (lire en page 5). Signe annonciateur de changements dans ce domaine? Difficile bien sûr de l’affirmer en l’état. Mais une chose est sûre: la pandémie qui bouleverse notre planète est un véritable puits de réflexion.