Nora Smith: «Filmer des corps libres? C’est l’extase!»

CULTURE • Avec ses films pornographiques éthiques, l’artiste lausannoise Nora Smith, explore un univers où gravitent corps, sexualité et identités. Rencontre avec une jeune artiste sortie de l’ECAL et bouillonnante de projets.

  • Nora Smith s’inspire de ses rêves, de la nature et de son vécu. DR

    Nora Smith s’inspire de ses rêves, de la nature et de son vécu. DR

Lausanne Cités: Quelle est la différence entre le porno éthique et le porno mainstream?
Nora Smith: Toutes nos réalisations chez Oil Productions - la société de production de film pornographique éthique que j’ai créée avec cinq artistes - sont éthiques et respectueuses de toutes les personnes travaillant sur le tournage. Au début, on a mis ce mot «éthique» pour nous démarquer du porno mainstream et pour défendre cette pratique, mais aujourd’hui, j’ai plus envie de cette étiquette. Cela devrait être normal de travailler dans le respect sur tous les tournages de films, ce qui n’est pas encore le cas pour le porno mainstream.

Le contenu des films diffère aussi...
Les autres artistes et moi faisons des films esthétiques fondés sur une grande communication avec les actrices et les acteurs. Nous leur parlons de nos idées et les adaptons en fonction de leur sexualité. L’atmosphère que dégage un film doit être naturelle et basée sur le plaisir et le consentement. Les thématiques liées aux pratiques sexuelles abordées et mises en scène libèrent la parole sur le côté «beau de la sexualité», la partie positive, et peuvent même permettre ensuite d’évoquer des mauvaises expériences. C’est un engagement militant.

Comment se déroule votre processus créatif?
Pour les photos, je commence par des croquis à partir de mes idées qui me viennent de la nature, de mes rêves, mon vécu… Après le photo shoot, je travaille énormément les photos en post-production. J’ajoute des symboles d’émotions comme les larmes ou la salive et les utilise pour transmettre des messages au public. J’aime également déformer les corps et utiliser la 3D pour rendre la photo palpable et vivante. J’invite la personne à se mettre dans un état presque méditatif, de communiquer pour les amener à atteindre les expressions, l’atmosphère que je souhaite.

Quand avez-vous commencé à vous intéresser aux corps et à la sexualité?
Dès l’école cantonale d’art de Lausanne (ECAL), pour mon travail de bachelor, quand j’ai réalisé un film pornographique. Je faisais un bachelor en photo et je voulais aller plus loin que simplement capturer des corps nus statiques. Il y a quelque chose de nouveau et d’intéressant dans le fait de filmer des corps libres, en mouvement, dans un lâcher-prise total et j’adore cette extase. J’avais envie d’analyser ce que cela représentait de créer un film porno et, à partir de ce moment, cette expérience m’a donné l’envie de continuer dans ce milieu.