«Un monde sans drogue est illusoire»

LAUSANNE • L’Office fédéral de la santé publique a opposé son veto à l’Université de Berne qui souhaitait mener une étude sur les effets d’une vente régulée de cannabis sur les consommateurs et sur le marché illégal. Le point de vue d’Oscar Tosato, municipal en charge de la cohésion sociale.

  • Oscar Tosato, Municipal en charge de la cohésion sociale. ca

    Oscar Tosato, Municipal en charge de la cohésion sociale. ca

Que pensez-vous de la décision de l’OFSP?

J’ai été surpris par cette décision. La Municipalité suivait de près le développement du projet pilote de régulation du cannabis développé par l’Université de Berne. La commission d’éthique cantonale bernoise d’éthique a autorisé ce projet de recherche et des expertises juridiques ont montré le bien fondé de celui-ci. Dès lors, je m’attendais à ce que l’OFSP accepte la demande d’autorisation. La ville de Lausanne était intéressée à connaître les impacts d’une telle recherche sur le comportement des consommateurs de cannabis et sur le marché illégal et, à ce titre, je ne peux que regretter que ce projet ne puisse pas se mettre en place.

L’OFSP brandit un argument juridique: la législation actuelle ne permet pas la consommation de cannabis pour des raisons autres que médicales...

L’OFSP a, il est certain, examiné en détail cette demande et s’est appuyé sur les éléments juridiques pour argumenter son refus. L’OFSP a ainsi choisi une lecture stricte de la loi sur les stupéfiants. C’est son droit et nous ne pouvons que prendre acte de cette décision. Il faut se rappeler que le cannabis reste la drogue illégale la plus consommée en Suisse avec toutes les questions que cela pose, notamment en termes de prévention pour les jeunes. On peut donc s’attendre à ce que le débat autour de la problématique du cannabis se poursuive et il est probable que de nouvelles propositions émergent dans le futur.

Y a-t-il des projets pilote à Lausanne qui pourraient être concernés par cette décision, je pense par exemple à celui relatif à l’espace de consommation sécurisé?

Non, le projet pilote de l’espace de consommation sécurisé n’est absolument pas remis en cause par cette décision. L’OFSP présente d’ailleurs cette prestation comme l’une des principales mesures de réduction des risques liées à la consommation de drogue. Douze espaces de consommation existent en Suisse aujourd’hui et l’OFSP ne remet pas en question cette prestation mais, au contraire, la soutient. Il s’agit de deux sujets distincts qu’il serait regrettable et dangereux de confondre.

Les Municipalités romandes reçoivent-elles un soutien suffisant et adéquat dans les politiques qu’elles mènent en matière de drogue et d’addiction?

La politique fédérale des quatre piliers a permis heureusement de développer une large palette d’offres, que ce soit dans le domaine de la prévention, de la thérapie ou de la réduction des risques. Ces programmes doivent être renforcés. Mais aujourd’hui, toutes les villes centre, romandes et alémaniques unies, font le constat qu’un monde sans drogue est illusoire, que la consommation festive est bien présente et que l’interdiction pure et simple de toutes les consommations n’apporte pas les résultats escomptés. Elles réclament une réglementation des substances psycho-actives afin de mettre un terme à tous les méfaits liés au fonctionnement du marché illégal.