«Les choses vont mal tourner!»

A Lyon, David Metaxas est connu pour être le très médiatique avocat du grand banditisme français.Pour «l'avocat des mauvais garçons», la vague de braquages violents qui a affecté la Suisse romande ne risque pas de connaître d'épilogue heureux.En cause, l'absence aussi bien en Suisse qu'en France, d'une politique carcérale orientée vers la réinsertion des délinquants.

  • L'avocat des «méchants» lyonnais.

Pourquoi les gangs lyonnais se sont-ils tournés vers la Suisse romande ?Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène. En 2009, une vague de braquages sans précédent, particulièrement dans le 2ème arrondissement de Lyon, connu pour sa concentration en magasins de luxe. Du jamais vu en nombre, plus de 80, mais aussi en modus operandi, avec l'utilisation d'explosifs, de gilets pare-balles et de kalachnikov. Très médiatisés, ces braquages ont suscité une importante réaction policière. Le résultat c'est que les braqueurs se sont déportés vers d'autres cibles. Et dans leur imaginaire, la Suisse symbolise cash et luxe, avec en outre la réputation de ne pas être préparée sur le plan policier. La cible idéale en quelque sorte!La police suisse était-elle vraiment insuffisamment préparée?La Suisse n'a jamais été confrontée à de vrais problèmes de délinquance. Les braquages violents, c'est un phénomène récent, et chez les Suisses, il y avait clairement un syndrome d'impréparation et d'incapacité à régler le problème, à l'inverse des Lyonnais qui ont de longue date une vraie culture du banditisme. Mais vos forces de police se sont rapidement mises au diapason, particulièrement à Genève, grâce notamment à une excellente collaboration avec la police judiciaire lyonnaise. La Suisse a même utilisé le service après-vente français en faisant poursuivre et condamner des braqueurs en France pour des délits commis en Suisse.Pourquoi ces braqueurs se sont-ils autant radicalisés dans la violence?En Suisse, la radicalisation de la répression avec la montée en puissance des forces de police, et le renforcement de la répression judiciaire a renforcé la détermination des braqueurs. Et puis, ceux-ci vivent dans un monde de représentation fondé sur les films et les jeux vidéos eux-mêmes de plus en plus violents. C'est d'autant plus impressionnnant que quand on parle à ces braqueurs, on constate que ce sont des gosses, totalement incapables de se mettre à la place de leurs victimes. Même quands ils montent au braquage avec des kalachnikov, ils n'ont pas l'intention de tuer. Ce qu'ils veulent, c'est l'argent!Comment va désormais évoluer la situation en Suisse?Difficile à dire, mais une chose est sûre: que ce soit en France ou en Suisse, les choses vont mal tourner, si on ne prend pas la peine de faire en sorte que ces jeunes aient un projet de réinsertion après leur sortie de prison, un avenir en quelque sorte!N'est-ce pas faire preuve d'angélisme et d'indulgence?Non car on n'a pas le choix si on veut les faire sortir de la spirale de la grande criminalité. Les statistiques sont claires: 100% des braqueurs viennent des milieux défavorisés.Proposer un avenir à des braqueurs français, est-ce bien le rôle de la Suisse?De nombreux braqueurs purgent leur peine en Suisse. S'il n'y a pas d'aménagement de peines, si on ne prend pas la peine de leur donner une formation, que vont-ils faire une fois sortis? Sur ce plan-là, le système carcéral suisse ne s'est pas mis au diapason. Il faut certes punir, mais il faut réinsérer dans le même temps, sinon on risque d'en faire des criminels endurcis et dangereux pour toute la société. Je sais de quoi je parle, je les côtoie tous les jours.N'êtes-vous pas fatigué de côtoyer les braqueurs à longueur de journée?Je suis épuisé. J'ai tout sacrifié à ces garçons, et tous les jours je me dis: j'arrête! Mais je ne sais pas pourquoi, je recommence, alors qu'il y a des jours où je joue ma vie!

Un livre de bad boy pour la gloire

CA • C'est un livre en forme de coup de poing. Dans son dernier ouvrage intitulé «Michel Neyret, mon meilleur ennemi et autres bad stories», le jeune et très médiatique avocat lyonnais règle, à travers 7 histoires judiciaires, ses comptes. Avec son passé d'abord, - n'est-t-il pas le défenseur acharné de bien mauvais garçons?-, mais aussi avec la justice française qui n'a pas hésité récemment à le mettre en examen dans le cadre de l'affaire Neyret, du nom de l'ancien numéro deux de la police lyonnaise, lui-même poursuivi. Détail significatif: c'est en Suisse, aux éditions Favre, et non en France, que l'ouvrage est publié, en forme d'ultime pied de nez à son pays. « Pierre-Marcel Favre (le patron des éditions Favre, ndlr) que j'aime beaucoup, m'a un jour proposé de publier un livre qui relaterait mes années de pratique en tant qu'avocat, se borne-t-il pourtant à rappeler. L'affaire Neyret nous a rattrapés et le livre est la synthèse de tout ça».

«Michel Neyret, mon meilleur ennemi, et autres bad stories». David Metaxas, éditions Favre.