L'été de... Pierre Keller

  • Pierre Keller

    Pierre Keller

Ancien directeur de l'ECAL, Président de l'Office des vins vaudois

Mes premiers souvenirs d'été remontent au début des années cinquante, alors que je découvre avec l'émerveillement de mes sept ou huit ans la nature et les animaux dans la ferme de mes grands-parents à Vich. Plus tard, l'enthousiasme de l'enfance fait place au désabusement de la préadolescence. Entre 12 et 16 ans, la belle saison laisse en effet dans mes souvenirs la trace de pique-niques particulièrement ennuyeux en compagnie de la smala familiale entre Glacière, Bursine, Bassine et bois du Risoux, au cours desquels j'attends avec une impatience à peine dissimulée le retour sur La Côte.A 16 ans, les vacances estivales m'emmènent pour la première fois au Sud des Alpes, où je m'initie avec ravissement au Tessin, au climat méridional et à la latinité au détour de Sonogno et du Val Verzasca.

En 1964, l'horizon s'élargit considérablement, puisqu'un grand périple initiatique m'emmène en bateau de Marseille par Gênes et Naples jusqu'à Haïfa où m'attend l'expérience idéaliste du kibboutz, mais aussi la Galilée, le Néguev, la Mer Rouge et Jérusalem. Le retour via Iskenderun, Mersin, Alanya, Antalya, Izmir, Istanboul, Athènes et le canal de Corinthe achèvera de me convaincre que je suis un enfant de la Méditerranée.En 1967, je passe un été mémorable à Londres, prélude à ma découverte de l'Amérique, 475 ans après Christophe Colomb. C'est d'abord New York, les docks, et le Village (le vrai, et non la copie frelatée pour touristes en mal de sensations fortes), puis la traversée du continent sous un soleil de plomb, par l'Arizona, Page et le Lake Powell, jusqu'à San Francisco, Los Angeles, la Basse Californie et le Mexique.

Dès lors et jusqu'en 1983, l'été sera synonyme d'évasion - l'enseignant que je suis devenu en est réduit, même si c'est déjà une chance exceptionnelle, aux sept semaines qui séparent le début juillet de la fin du mois d'août - aux quatre coins du monde et tout particulièrement en Amérique Latine et en Asie. Ce n'est qu'au fil des années que la soif d'horizons lointains s'assagit, pour trouver son bonheur dans les îles grecques, Mykonos et le Dodécanèse, et surtout un petit paradis dont je garde jalousement le secret de crainte d'y retrouver bientôt toutes mes relations lausannoises.