L'athlétisme, c'est un tout, un spectacle global, qui ne se résume pas à une seule personne. Certes, Usain Bolt a installé une sacrée belle lumière dans ce sport mais il faudra bien qu'un jour on court sans lui, les organisateurs fassent sans lui, le monde des pointes se privent d'une étoile.
Pépins physiques
Au début de la saison, le Jamaïcain a connu des pépins physiques. A Rome, le 6 juin, sur 100 m, il a été battu par Justin Gatlin (9''94 contre 9''95). Péripétie pour Bolt, sextuple champion olympique. Gros coup pour la confiance de l'Américain, ancien banni, 3e aux JO de Londres. «On n'engage que des athlètes qui sont en forme, qui assurent des bons résultats», explique Jacky Delapierre, patron d'Athletissima. «Bien sûr, Usain sera performant aux Mondiaux de Moscou (10 au 18 août), mais il ne l'est pas encore. Le faire venir est très onéreux.» A Rome, le 13 juin, il a couru, seul et avec un vent favorable (1,7 m/s), le 200 m en 19''79. La réflexion du boss d'Athletissima n'a pas changé d'un iota. A moins d'un séisme, d'un éclair de génie, la «Foudre», qui est à l'affiche du meeting Diamond League parisien le 6 juillet, ne sera pas à Lausanne deux jours avant.Reste que, même sans Usain Bolt, le 100 mètres des hommes sera l'une des épreuves les plus attractives. Au départ, il y aura Blake (record personnel 9''69 à Lausanne en 2012), Gatlin (9''79 aux JO de Londres), Gay (9''69) et Powell (9''72 à Lausanne en 2008). Ces quatre félins coûtent moins chers que Bolt seul. Jacky Delapierre pose un adjectif sur chacun de ces fous courants. «Gay, c'est le méthodique, Gatlin, le copain, je le mets au bénéfice du doute. Il s'est fait piéger par naïveté. Blake, c'est l'imprévisible. Powell, la fidélité.» Le boss les aime tous. C'est aussi pour cette raison du cœur qu'il n'a pas ménagé sa peine, laissant sur ces pistes beaucoup d'énergie pour les avoir le 4 du mois prochain, à Lausanne. «Tous les managers nous font confiance, et tous ils nous reconnaissent une certaine crédibilité.» Le boss est modeste. Il faut plutôt parler d'une crédibilité certaine.
Dans les virages
Dans un des virages, le public verra de très près le saut à la perche des hommes. Le concours y sera à nouveau extraordinaire avec Renaud Lavillenie, médaillé d'or partout sauf à des mondiaux, lequel sera à nouveau confronté à une compagnie de sauteurs allemands redoutables et redoutés. Le 1er juin à Eugene (Diamond League), le voltigeur tricolore a terminé premier du concours avec 5,95 m, devançant l'armada allemande au complet. Plus tard à Rome, le Français a été battu par Holdzeppe - petite revanche, il était 2e aux Etats-Unis -, mais il a devancé le solde de la compagnie germanique, Mohr et Otto. Pour l'anecdote, Renaud Lavillenie, qui a installé un sautoir dans son jardin, a amélioré dernièrement son record personnel en franchissant la barre à 5,84 m. Fou!En face, dans l'autre courbe, se déroulera le saut en hauteur des hommes. L'année dernière, ce concours avait été «énorme», le plus haut et le plus intense de ces dix dernières années; or il a passé presque inaperçu. Barshim du Qatar avait réussi 2,39m, Ukhov (Russie), qui a mis de côté la vodka, 2,37m et l'Anglais Grabarz, 2,37m aussi, mais battu aux essais. A Eugene, au début du mois de juin, le Qatari a franchi 2,40 m. Depuis 13 ans, personne n'avait été aussi près des étoiles dans cette discipline.
Les pleurs de Sanchez
D'autres grands moments seront à vivre. Le 200 m des dames avec Allyson Felix, triple championne du monde et parée d'or olympique. Elle retrouvera sur sa route Carmelita Jeter, trois médailles aux JO de Londres, dont le bronze sur cette distance. Le 400 m haies des messieurs promet beaucoup d'étincelles et d'émotions avec l'immense Félix Sanchez, longtemps blessé et au fond du bac, en or à Londres avec le même chrono (47''63) que celui obtenu huit ans auparavant aux JO d'Athènes. En pleurs sur le podium, parce que revenu de nulle part, le Dominicain, 35 ans, a aussi ému la planète entière.La saison dernière, Athletissima, par la grâce des résultats enregistrés et de son intensité, ajoutés à bon nombre d'autres évaluations, avait été classé premier meeting mondial. Bis repetita en 2013?