Brésil et foot, les deux mamelles de la passion

FOOTBALL • La Coupe du monde 2014, c'est demain. Se rend-on seulement compte à quel point l'événement, à la fois écho de notre enfance et tornade médiatique, va nous toucher? La réponse est non.

  • Le foot au Brésil? Un spectacle complet qui se joue dans et en dehors du stade.

    Le foot au Brésil? Un spectacle complet qui se joue dans et en dehors du stade.

  • Le foot au Brésil? Un spectacle complet qui se joue dans et en dehors du stade.

    Le foot au Brésil? Un spectacle complet qui se joue dans et en dehors du stade.

Personne n'a connu ça depuis l'été 1950; et personne ne l'avait vécu auparavant. Une Coupe du monde de football au Brésil, c'est trois fois moins fréquent qu'une Fête des Vignerons et bien plus aléatoire que la Comète de Halley, dont le dernier passage remonte à 1986, alors que le prochain est déjà fixé pour 2061.La bonne nouvelle, et cette équipe de Suisse jeune, mixte et prometteuse ne dira pas le contraire, c'est qu'il y en a une attendue pour la fin du printemps 2014, de Coupe du monde au Brésil. «Là, on ne se rend pas encore bien compte», ont souri sur le tarmac de Tirana et des étoiles plein les mirettes plusieurs des sélectionnés helvétiques, fraîchement qualifiés pour le raout magique, et ils ont raison. Une Coupe du monde au Brésil... Personne ne peut mesurer l'ampleur du phénomène avant d'y avoir goûté. La dernière fois, après trois semaines d'euphorie, cela s'était achevé sur un drame national, avec des suicides du haut des tribunes de Maracana, par la faute de Juan Alberto Schiaffino et Alcides Ghiggia, deux buteurs uruguayens venus détruire le rêve de tout un peuple.

Une tornade

Le Brésil et le foot, ces deux indissociables mamelle, vont faire tourner la planète encore moins rond que d'habitude, du 12 juin au 13 juillet prochain. Un enjeu politique majeur, une cause économique pas moindre, une tornade médiatique à redouter, un volcan social on l'a vu et, accessoirement, un tournoi à gagner à tout prix pour les stars, les diffuseurs et les sponsors. Vu comme ça, c'est une affreuse machine, le Mondial. Mais le monstre, chez Mary Shelley (Frankenstein) comme chez David Lynch (Elephant Man), recèle toujours au fond de lui une part de bonté, de beauté. Parfois, elle est importante au point de nous faire oublier le reste.Une Coupe du monde au Brésil, pour ceux qui aiment le foot et n'en déplaisent à nos amis anglais l'espace d'un mois, c'est l'essence du jeu; le cœur de la flamme, l'épicentre de la passion. «Gamins, on a tous été le Brésil dans le jardin. Quand j'allais aux buts, j'étais Taffarel. Et quand j'en marquais, j'étais Romario», résume joliment Steve Von Bergen, aujourd'hui défenseur central de l'équipe de Suisse.Lui, il a grandi au rythme endiablé des champions du monde de 1994. Avec le Brésil, cinq fois sacré et tantôt massacré, c'est à chacun sa Seleção, à chacun ses idoles, sa légende, ses triomphes ou ses blessures. Il y a ceux qui ont chialé au fer rouge d'une génération merveilleuse et maudite, celle des Zico-Falcão-Socrates (1982 et 86). Il y a ceux qui ont la chance de vibrer encore aux exploits de Pelé (1958, 62 et 70) - ils auraient peut-être dû déguster mieux ceux de Garrincha, le petit coucou boiteux et génial qui, avec sa jambe plus courte que l'autre mais toutes ses ailes, donnait le tournis aux défenseurs avant de servir le Roi.

Un spectacle total

Le Brésil, c'est quand le football devient danse, spectacle, hymne à la joie ou tragédie. Pour les historiens, c'est le fantastique Lêonidas qui invente le retourné acrobatique le 12 juin 1938 contre la Tchécoslovaquie. Pour les esthètes, c'est un bonheur quasi permanent. Qu'on soit romantique ou picaresque, Rivelino ou Ronaldo, il y a là une source intarissable d'émotions. Là-bas, c'est même une raison de vivre.«Tu te rends compte?!? Je vais fêter mes 60 ans pendant un Mondial au Brésil...», s'exclamait comme s'il en avait 53 de moins Michel Pont, adjoint ébaubi du sélectionneur helvétique, avec son pin's à la boutonnière. La dernière fois que c'est arrivé, il n'était pas né.