L’invasion des imbéciles

Porteur de tant de promesses, internet se mue peu à peu en une immense agora numérique où, protégés par un très trompeur anonymat, certains s’en donnent à cœur joie, donnant libre cours à leur amertume et leur frustration. Dernière à en faire les frais, la conseillère nationale Ada Marra qui parle de fermer son compte Facebook, noyé sous des flots d’injures. Alors bien sûr dans une démocratie, le débat, même disputé, est sain et souhaitable. Mais il ne saurait devenir le prétexte à un déferlement de haine où seul l’avis de celui qui a le dernir mot compte, dans une perpétuelle et stérile surenchère de méchancetés et de malentendus. Décédé l’année dernière, l’intellectuel italien Umberto Eco avait pressenti le danger: «Les réseaux sociaux, déclarait-il, ont donné le droit de parole à des légions d’imbéciles qui, avant, ne parlaient qu’au bar, après un verre de vin et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite alors qu’aujourd’hui ils ont le même droit de parole qu’un prix Nobel. C’est l’invasion des imbéciles».