Aung San Suu Kyi doit se réveiller

  • Alain Bovard, Politique des droits humains, Amnesty International, Section suisse

    Alain Bovard, Politique des droits humains, Amnesty International, Section suisse

Pas un jour depuis début septembre sans que le nombre des réfugiés Rohingyas fuyant le Myanmar n’augmente. Un demi-million à ce jour, soit la moitié de cette communauté musulmane perdue dans la population à majorité bouddhiste du Myanmar.

Totalement marginalisés dans la province la plus pauvre du Myanmar, privés de leurs droits les plus élémentaires, ils voient aujourd’hui déferler la violence des militaires qui, sous prétexte de chasse aux terroristes, brûlent des villages entiers, exécutent des civils innocents et s’adonnent sans réserve au viol et au pillage.

Que dire, dans ce contexte de violence extrême, d’Aung San Suu Kyi, leader symbolique et nobélisée du gouvernement, dont le silence d’abord, puis les prises de position pour le moins ambigües n’ont pas manqué d’intriguer, voire d’indigner?

Certains ont pris sa défense en disant qu’elle n’est pas libre de ses paroles. C’est partiellement vrai et l’armée du Général Min Aung Hlaing contrôle toujours la sécurité du pays. Mais n’oublions pas que jamais par le passé la dame de Rangoon n’a pris clairement la défense des Rohingyas ou des autres minorités musulmanes, reflétant ainsi la position de la majorité de la population qui considère les Rohingyas comme des immigrés et non comme des citoyens.

Aung San Suu Kyi, par son inaction, a certainement aggravé le sort de Rohingyas. Son silence montre aux militaires qu’ils peuvent agir en toute impunité puisqu’elle a couvert les exactions commises par l’armée. A elle maintenant de sortir de sa réserve, de montrer clairement qu’elle se préoccupe du sort des Rohingyas et de condamner les dérives de l’armée.

Il est encore temps pour elle de se réveiller et de dire aux militaires et à l’opposition armée qu’une solution respectueuse des droits humains est possible au Myanmar.