«Les communes sont les seules perdantes de RIE III»

  • Le canton vient d’annoncer une mise en œuvre anticipée de la RIE III plébiscitée en votation par les Vaudois.
  • Problème: les communes vont enregistrer un manque à gagner supplémentaire de 50 mios pour la période de transition.
  • Présidente de l’Union des communes vaudoises, Claudine Wyssa annonce une concertation avec le Conseil d’Etat.

  •  Claudine Wyssa. verissimo

    Claudine Wyssa. verissimo

«Tout cela donne la désagréable impression que les choses se font sans concertation»

«J’espère que le conseil d’Etat entrera en matière»

Pourquoi l’entrée en vigueur unilatérale de la RIE III vaudoise en 2019 fait-elle peur aux communes vaudoises?

Disons qu’elle inquiète plus qu’elle ne fait peur. Sur le fond, la nécessité de cette réforme n’est pas remise en question par les communes qui l’ont soutenue au moment de la votation.

Où est le problème dans ce cas?

Avec l’entrée en vigueur anticipée par le canton pour 2019, le montage financier qui était prévu va être déséquilibré. Des trois pôles impliqués dans la réforme RIE III, le social, l’économie et les communes, ce sont les communes les seules à y perdre.

Et pour quelle raison?

RIE III fait perdre de l’argent au canton et aux communes, mais au départ le dispositif avait été calculé et anticipé pour que le manque à gagner soit plus facilement supportable par les communes.

Et aujourd’hui, ce n’est plus le cas?

Non et pour deux raisons. D’abord parce que la RIE III fédérale a été rejetée par le peuple et que le parlement fédéral ne sera pas prêt pour la nouvelle mouture Projet fiscal 17 avant deux ans. Or, le volet fédéral prévoyait une compensation pour les cantons, dont un tiers devait être reversé aux communes, soit 33 millions pour les communes vaudoises. En outre, la baisse générale d’impôts pour les entreprises devait être compensée par l’imposition des entreprises à statut spécial, soit l’équivalent de 15 à 20 millions. Tout cela conduit à un déficit supplémentaire de 50 millions pour les communes, en plus des 134 déjà prévus par la réforme.

Pourquoi le Conseil d’Etat n’a-t-il pas pris contact avec les communes afin d’anticiper cette situation?

En effet, cela n’a pas été le cas et nous en sommes d’autant plus déçus que nous avions nous-mêmes pris les devants pour demander un rendez-vous. Du coup, nous avons été un peu surpris par cette nouvelle, annoncée avant la rencontre prévue. Tout cela donne l’impression assez désagréable que tout se décide sans concertation. C’est d’autant plus dommage que le canton compte plus de 300 communes et qu’il n’a aucun intérêt à provoquer une fronde de leur part.

Cela dit, le Canton lui-même perd beaucoup d’argent avec cette entrée en vigueur anticipée ...

Oui, sauf que c’est sa décision, alors que nous de notre côté, n’avons rien décidé! Et le Canton a pu anticiper et prévoit de faire des réserves sur le résultat des comptes 2017 pour absorber les pertes de 2019.

Et pourquoi de leur côté, les communes n’ont-elles pas anticipé?

Nous n’avons aucune structure qui permette d’anticiper de manière centralisée. De fait, chaque commune fait face avec ses propres moyens et ses propres critères. L’UCV va par contre refaire le calcul effectué au moment où le Grand Conseil a voté la nouvelle péréquation, en tenant compte des pertes que j’ai évoquées pour que nous puissions informer les communes de leur situation individuelle.

Pensez-vous que le Conseil d’Etat va accepter de compenser une part de ces pertes?

Nous sommes confiants sur le fait qu’il entrera en matière. Une discussion est agendée et nous avons toute une année pour la mener à terme et trouver une solution de compromis.

Si aucune solution complète ou partielle se dessinait, quelles seraient les conséquences pour les finances des différentes communes?

Chaque commune devra voir comment elle peut absorber la diminution de revenus. Certaines vont pouvoir anticiper, d’autres devront s’endetter un peu plus pour une période transitoire, et d’autres enfin devront augmenter leur taux d’imposition, ce qui impactera non seulement les personnes physiques, mais aussi les entreprises, celles-là mêmes qui devaient être favorisées par RIE III! Et puis, il n’est pas exclu que certaines doivent renoncer, au moins provisoirement, à certaines prestations.

20 millions en moins pour Lausanne

A Lausanne aussi, la décision du Conseil d’Etat n’est pas sans conséquences. Le décalage entre la réforme fédérale et la réforme cantonale coûtera environ 20 millions à la commune. «La décision du Conseil d’Etat est compréhensible, et permettra de faire entrer en vigueur rapidement la hausse des allocations familiales et le plafonnement des primes d’assurance maladie à 10% du revenu, deux mesures attendues par la population», explique Florence Germond, la municipale lausannoise en charge des finances, qui déplore: «mais le Conseil d’Etat aurait dû associer les communes à cette décision et prévoir l’entrée en vigueur de l’ensemble du paquet y compris les montants négociés avec les communes. C’est une remise en cause des accords conclus et de la feuille de route. Nous allons donc nous engager au côté de l’UCV pour obtenir une compensation équitable et supportable pour les communes».