La fraude au rendez-vous

AIDE SOCIALE • Un récent rapport démontre une réalité déjà observable dans les rues de la capitale vaudoise, le nombre d'assistés est énorme à Lausanne. Il dépasse nettement la moyenne nationale. Rencontre avec deux bénéficiaires qui se moquent des lois et en profitent impunément.

  • La fraude à l'aide sociale: un «sport» pour certains.

    La fraude à l'aide sociale: un «sport» pour certains.

Boris* a 38 ans. Après une longue période de chômage, il a décidé de ne plus vraiment chercher un poste fixe à 100%, mais plutôt de bénéficier de l'aide sociale. «J'habite dans le quartier sous-gare et je m'y sens bien. L'Etat me paie mon petit appartement, mes factures normales, et me donne de l'argent pour me nourrir et me vêtir. J'arrive à économiser sur ces sommes pour envoyer de l'argent à ma famille au Maroc. Je n'ai pas vraiment à me plaindre. Il y a peu de pays qui sont aussi généreux.» Que Boris touche l'aide sociale est son droit. Le problème se situe ailleurs. Ce peintre en bâtiment travaille parfois au noir pour arrondir ses fins de mois. Avec une certaine conscience de ses actes. «Je sais que je devrais déclarer ce que je gagne quand des potes me paient pour effectuer des travaux sur des chantiers, mais je préfère pas. Comme ça, je continue à toucher de l'argent de la commune, c'est l'idéal. Mais je ne vais pas faire cela trop longtemps, c'est risqué. Mon but est d'envoyer assez de sous au pays pour m'acheter un appartement et aider les miens restés là-bas.»

Filon connu

Installé dans un petit café au centre-ville, Boris nous présente un de ses amis algériens, Karim*, qui profite également de ce filon illégal. «Je suis aussi au social. Mais vous savez, nous on profite un peu, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Nous avons des potes qui ont vraiment besoin de cette aide pour s'en sortir. Ce n'est pas facile pour tous.» Se rendent-ils compte de la gravité de leur démarche? Pas vraiment. «Je ne trouve pas cela très grave franchement, sourit Karim. Il y a pire. On ne tue personne, on profite juste un peu d'un système trop généreux, c'est tout.»Et ils sont de plus en plus nombreux à le faire. Le récent rapport sur les indicateurs de l'aide sociale publié par l'Initiative des villes pour la politique sociale montre que la ville de Lausanne est une championne en matière d'aide sociale. 9,4% de la population en bénéficie. Soit près de deux fois plus que la moyenne nationale. Devancée par Bienne, la capitale vaudoise arrive en seconde position. Le rapport démontre des aspects intéressants de cette démarche sociale. Il indique «que la proportion (ndlr. qui touche l'aide sociale) chez les étrangers est nettement plus élevée que chez les Suisses».

Inquiétant et coûteux

Le taux de personnes à l'aide sociale varie très fortement selon les villes. La ville de Bienne bat tous les records avec 11,4% d'assistés, Lausanne la suit de près avec 9,4% alors que la moyenne nationale est plus proche des 5%. Comment expliquer ce phénomène? «Il y a une population étrangère de près de 40,4% à Lausanne et un fort taux de chômage», précise Oscar Tosato, municipal en charge de l'enfance, de la jeunesse et de la cohésion sociale. «La capitale vaudoise fait figure d'exception, c'est vrai.» Une exception inquiétante…et coûteuse.

* noms connus de la rédaction