Missiones… C’est le nom d’une langue de terre étranglée aux confins de l’Uruguay, du Brésil et du Paraguay, entre les fleuves Uruguay et Paraná. La taille d’une nation à l’échelle européenne, les dimensions d’une simple province sur la carte du 8e plus vaste pays du monde, grand comme cinq fois la France.
De 1550 jusqu’au début du XXe siècle, les rivières constituent le moyen le plus sûr et le plus rapide pour pénétrer ces territoires sauvages.
Témoins du passé
Pendant plus de 350 ans, explorateurs et jésuites vont donc s’y aventurer à travers une jungle épaisse dont ne subsistent aujourd’hui que quelques portions protégées. Des ruines témoignent encore de la trentaine d’anciens regroupements catholiques. Classées par l’UNESCO, celles de San Ignacio Mini sont les plus spectaculaires.
Volées à la forêt primitive, rougies par l’oxyde de fer, les longues routes souvent vallonnées sont aujourd’hui ponctuées de pins, eucalyptus, pâturages, plantations de thé ou maté. Faites de quelques planches sous tôle ondulée, les spartiates habitations paysannes ramènent à la précarité des premiers voyageurs colons. Le touriste contemporain peut séjourner dans de confortables loges aménagées en bordure de la jungle ou dans de belles demeures coloniales ouvertes à l’agro-tourisme.
Mythiques cavaliers
Emblématique, le gaucho ne serait-il pas à l’Argentine ce que le cow-boy est aux USA: un fantasme de la littérature et du cinéma, l’un des symboles supposés fédérer un pays aux populations et aux climats si diversifiés?
Pour Sylvia, descendante de propriétaires terriens et héritière d’une «modeste (sic!) estancia de 8000 hectares», ces parangons d’honneur, de force et de bravoure sont avant tout des employés agricoles. Ces solides garçons se lèvent de bonne heure pour dresser les chevaux, rassembler les troupeaux, traire les vaches. Leurs ancêtres mestizos (métis d’origine espagnole et amérindienne) n’avaient rien d’aristocratique. Ils ont néanmoins durablement esquissé l’imagerie du dandy de la pampa, avec sa chiripá (tissu drapé entre les jambes), ses jambières en cuir à franges et son pantalon plissé dont le bas est boutonné aux chevilles pour faciliter la chausse des bottes. Un gaucho ne se sépare jamais de son facón, un poignard aussi fameux que le couteau suisse! Relégué au rang de héros folklorique, il n’en conserve pas moins la fierté de son cheval et un appétit hors du commun pour l’asado, l’incontournable barbecue argentin accompagné de salades et/ou petits pains arrosés de vin rouge. n