«Vous venez ici pour admirer nos beaux paysages?» demande Knut en ouvrant la portière du taxi, à l’aéroport d’Oslo. «Vous ne serez pas déçu: ici, même si nous avons un roi [ndlr: la Norvège est une monarchie constitutionnelle], c’est d’abord la nature qui gouverne. Comme vous verrez, nous nous appliquons à la respecter et à vivre en harmonie avec elle. A mon avis, l’hiver est la période idéale pour explorer notre territoire. En toute quiétude, vous y effectuerez certains des plus beaux trajets ferroviaires du monde. Vous dormirez peut-être dans un hôtel de neige et de glace, surpris par son confort chaleureux.» Une telle faconde de la part d’un chauffeur pourrait laisser soupçonner qu’il travaille en sous-main pour le tourisme norvégien. A vérifier in situ!
Le grand show du froid
De fait, on a tôt fait de photographier un superbe cadre naturel. Le paysage inclut aussi bien des plaines neigeuses, des monts et des forêts qu’un espace marin glacial. Bien sûr, on peut être dérouté par la noirceur hivernale, déprimante pour certains. La ville de Rjukan, située à l’ouest d’Oslo, a installé des miroirs géants sur une crête. Ils suivent en permanence la trajectoire du soleil et renvoient ses rayons sur la place centrale. Oui, par endroits, la vie est ultramoderne. Ailleurs, elle s’appuie sur des traditions millénaires, où les trolls font figure de mascottes. Les boutiques déclinent à l’envi les trognes grotesques de ces facétieux lutins.
Composer avec la nature
L’environnement norvégien est admirable, mais exigeant. Il a façonné les mentalités des hommes qui ont dû – autant qu’ils le pouvaient – apprivoiser les forces élémentaires et développer des techniques de survie. Ils ont ainsi déployé des trésors d’ingéniosité pour tirer parti de ressources souvent limitées. Impossible, par exemple, de ne pas remarquer l’omniprésence du rouge sur les façades. Autrefois, c’est le sang animal qui prodiguait le pigment utilisé. Aujourd’hui, les planches sont peintes avec un mélange d’huile et de poudre de roche concassée. Cette peinture n’est pas absorbée par le bois qui peut ainsi respirer et offrir une meilleure protection contre l’humidité hivernale. En Norvège, la morue est exploitée depuis le XIe siècle, utilisée pour l’éclairage, dans la lutte contre le rachitisme… et l’imperméabilisation des vêtements! Textes: Bernard Pichon