Comme une huître, la Nouvelle-Orléans, la ville la plus touristique de Louisiane cache bien sa perle. De prime abord, on pourrait être rebuté par une banlieue si vaste, si plate, si banale. Il faut traverser ces zones interlopes pour dénicher le berceau du jazz dans ce que les anglophones appellent le French Quartier, un Vieux Carré dont les rues en damier tracent une figure plutôt rectangulaire.
Si elles s’appellent toujours Chartres, Toulouse ou Dauphine, c’est pour mieux nous ramener à la fin du XVIIe siècle, lorsque les premiers colons français – au passé parfois douteux – y mêlaient leur sang à celui des Indiens, gens de couleur et autres pirates caribéens.
Héritage
Que reste-t-il de cette époque où les riches propriétaires de plantations de canne à sucre et de coton venaient s’encanailler dans les plus célèbres maisons closes du Mississippi… là où – deux siècles plus tard – les instruments de Louis Armstrong ou Sidney Bechet allaient livrer leurs premiers accents, souvent désespérés?
L’architecture, d’abord, la gastronomie, aussi… sans oublier les traditions vaudou. On voudrait effacer ce jour de 2005 où les flots du lac Pontchartrain se sont déchaînés sous l’impulsion de l’ouragan Katrina. La ville avait connu d’autres vicissitudes. Au XVIIIe siècle, deux incendies avaient ravagé ses premières maisonnettes coloniales en bois. C’est aux Espagnols qu’elle doit ses habitations de brique, photographiées aujourd’hui pour leurs balcons aux ferronneries raffinées.
Jazz story
Omniprésente, la musique est métissée jusqu’à la cacophonie: le long de Bourbon Street, les fenêtres ouvertes des bars distillent leur heavy rock teinté de pop, funk ou disco, auxquels les musiciens du trottoir n’hésitent pas à mélanger leurs propres additifs. Et le bon vieux dixie, dans tout ça? Les bonnes adresses se tiennent un peu à l’écart des établissements médiocres et racoleurs, avec leurs flots de bière et décibels.
Dans cette ville où l’on peut acheter des masques toute l’année (le plus souvent emplumés et made in China!), la période de carnaval ajoute sa licence à d’autres débordements. Depuis quelques années, la tendance étant à l’exhibition des corps dénudés et aux attitudes de plus en plus équivoques, la municipalité déconseille la fréquentation des cortèges aux famille avec enfants … c’est tout dire!