Caroline Loeb: «Je ne suis absolument pas nostalgique!»

MUSIQUE • A l’affiche du CPO, la chanteuse, comédienne et metteuse en scène française Caroline Loeb y présentera le 24 septembre son nouveau spectacle musical «Chiche». L’interprète du tubissime «C’est la Ouate» se raconte dans ce spectacle inédit, tantôt émouvant, tantôt punk, livrant des reflets de ces fameuses années 80. Rencontre avec une artiste plus libre que jamais.

  • Caroline Loeb fait partie des incontournables des années 80. DR

    Caroline Loeb fait partie des incontournables des années 80. DR

"La meilleure manière de faire passer des idées, c’est par sa vie et son œuvre"

Lausanne Cités: Pourquoi ce titre, «Chiche!»? C’est un défi lancé à qui?
Caroline Loeb: A moi-même! Comme je le dis dans le spectacle «Je ne suis pas connue comme chanteuse. Je suis connue comme chanson!» C’est «Chiche! Je chante toujours!». J’ai choisi d’assumer frontalement ce drôle de paradoxe qui est celui d’être fortement identifiée à mon tube des années 80 alors que ma vie d’artiste n’a jamais été aussi riche que ces dernières années. J’ai construit le spectacle avec les chansons de mon dernier album «Comme Sagan», autour de l’auteure de «Bonjour tristesse». C’est pour moi la suite logique du spectacle «Françoise par Sagan», mis en scène par Alex Lutz, que j’ai eu le bonheur de jouer au CPO. Lorsque j’ai découvert qu’elle avait écrit des chansons, cela m’a donné l’envie de faire un nouvel album. Evidemment, le point de départ c’est elle, mais c’est surtout un album intime qui aborde des thèmes qui me touchent profondément, comme l'amour de la littérature, la solitude, le goût de la liberté, de la vitesse et des nuits blanches.

Dans votre spectacle, vous revenez en musique sur votre carrière aux détours parfois surprenants, et sur quelques grandes figures des années 80… Est-ce que vous n’auriez pas une pointe de nostalgie?
Je ne suis absolument pas nostalgique. Je parle de cette période avec autodérision. Et j’évoque d’autres choses que les années 80, heureusement. Je ne fais pas partie des artistes qui restent scotchés à ces années-là!

Dans le fond, est-ce que comme on entend souvent le dire, «c’était mieux avant»?
C’est vrai que le monde est de plus en plus violent, à tous points de vue. Mais personnellement je suis beaucoup plus heureuse aujourd’hui avec mes spectacles de théâtre et mes mises en scène que lorsque j’étais réduite à un 45 tours!

Dans vos spectacles, vous rendez hommage à des figures féminines fortes, comme George Sand, Françoise Sagan ou Mistinguett. La cause féministe vous tient à cœur?
Bien sûr! En même temps, ce qui est paradoxal, c’est que ce sont des femmes qui ne se sont jamais définies comme féministes. Elles étaient trop libres pour rentrer dans un mouvement. Cela me va. Je déteste ce que le militantisme peut avoir de sectaire. Je pense que la meilleure manière de faire passer des idées, c’est par sa vie et éventuellement son œuvre. J'espère continuer à transmettre ce flambeau et dire avec mon travail que l’on peut s’affranchir des clichés qui enferment les femmes dans des rôles subalternes ou dévalorisants.

En Suisse, tout le monde vous connaît pour votre tube «C’est la Ouate», mais un peu moins pour votre impressionnante carrière au théâtre comme metteuse en scène…
J’ai une vraie passion pour le théâtre, et cela fait maintenant presque trente ans que je fais de la mise en scène. J’adore ça. J’ai commencé dans l’un des plus beaux théâtres de Paris, Les Bouffes du Nord avec Michel Hermon. J’ai mis en scène beaucoup de spectacles musicaux, une autre façon de rester connectée à la musique. Lio, dans «Lio chante Prévert», Viktor Lazlo dans «Loin de Paname»... Comme je suis mordue des comédies musicales des années 30, 40 et 50, mettre en scène de la musique me plaît beaucoup. Il y a aussi eu «Shirley» avec l’immense Judith Magre qui lui a valu son deuxième Molière. En ce moment, je travaille sur la pièce d’un jeune auteur très talentueux, Jean-Pierre Brouillaud, «Le train de la voie 6» à laquelle je crois beaucoup, et que je vais monter l’année prochaine.

Vous continuez à chanter «C’est la Ouate» sur scène?
Oui, je la chante encore parfois dans des tournées «Années 80».

Toujours avec autant de plaisir?
Comme le plaisir du public est toujours au rendez-vous, il me revient en boomerang. Et puis ça fait un petit lifting instantané sans bistouri! Par ailleurs, c’est grâce à ces tournées que j’ai pu produire mes propres spectacles depuis des années. Mon luxe suprême, c’est d’être maîtresse de mon travail.

Au CPO, on pourra découvrir une autre facette de votre répertoire, plus orientée chanson et jazz… avec des titres extraits de votre dernier album «Comme Sagan», réalisé par Jean-Louis Piérot, l’alter ego d’Etienne Daho depuis trente ans. Les années 80 ne sont jamais loin?
Je n’ai pas choisi Jean-Louis Piérot à cause des années 80, mais parce que c’est l’un des meilleurs réalisateurs français. Il a aussi réalisé des albums pour Miossec, Tété, Le soldat rose, et co-réalisé avec Etienne Daho le dernier album de Jane Birkin. Il a une sensibilité et un talent fous.

Vous venez souvent du côté de Lausanne…
J’aime beaucoup cette ville. Evidemment le lac, dont je ne me lasse pas, mais aussi le Musée de l’Art Brut pour lequel j’ai une vraie passion. J’y passe à chaque fois avec le même éblouissement.

On a aperçu récemment sur les réseaux sociaux des photos de vous sur un tournage aux côtés de Lambert Wilson…
J’ai eu la joie d’être choisie par Isabelle Mergault pour son prochain film, «Des mains en or» aux côtés de Josiane Balasko, Lambert Wilson et Sylvie Testud. Le tournage a été un régal, et je crois que le film va être très réussi. Drôle et plein de tendresse, comme sa réalisatrice!

«Chiche», au CPO le 24 septembre à 20h, www.cpo-ouchy.ch