Lausanne fait son cinéma: «Dans la ville blanche» d'Alain Tanner

Chaque semaine notre chroniqueur Thomas Lécuyer vous propose un film dont Lausanne est le décor... Aujourd'hui, «Dans la ville blanche» -d'Alain Tanner (1983)

Récompensé par le César du Meilleur Film Francophone en 1984, «Dans la Ville Blanche» nous entraîne dans les pas de Paul, un marin suisse qui déserte son poste lors d'une escale à Lisbonne, après avoir remarqué une horloge qui tourne à l’envers dans un café. Tombé amoureux de la serveuse du bar qui lui rétorque que ce n’est pas l’horloge qui tourne à l’envers, mais le monde, il s'installe dans un petit hôtel de la ville et commence alors un lent voyage dans la ville et en lui-même, armé de sa caméra Super 8. Il commence à envoyer régulièrement à son épouse, Elisa, restée à Lausanne, des cassettes vidéo, où il lui raconte son errance dans la capitale portugaise et ses amours avec la serveuse.

Dans cette ville blanche écrasée sous la chaleur et hypnotique, le réalisateur genevois Alain Tanner signe une bouleversante quête de sens et de liberté, celle d’un homme perdu qui espère se retrouver grâce au miracle (mirage ?) de l’amour. Si Lisbonne est la véritable héroïne du film, Lausanne n’est jamais très loin, comme un miroir sans tain ou un écho permanent, le souvenir d’une vie d’avant qui peut peut-être encore ancrer l’ex-marin égaré dans sa fuite en avant.

Le cinéaste prend le parti de l’errance et de la contemplation dans de longues scènes qui mêlent rêves et réalité, usant d’une poésie du silence et du temps mort absolument atypique au cinéma. Bruno Ganz, qui incarne Paul et est pratiquement présent dans chaque plan, tour à tour torturé ou désinvolte, a trouvé sans doute ici un de ses plus grands rôles.