Coup de gueule: Le camp du bien

J’étais pour les Gripen, le peuple a dit non, je l’accepte. C’est le lot de notre démocratie: prendre acte de la décision du souverain, plutôt que de pérorer sur un peuple mal informé, qui aurait mal voté, se serait laissé avoir «par les sirènes du populisme».

Je m’incline, mais note deux poids et deux mesures. Ainsi, ces commentateurs enragés, dès le lendemain du vote, exigeant le départ d’Ueli Maurer. Les mêmes, au lendemain du 9 février, réclamaient-ils la démission de Didier Burkhalter? Non, bien sûr. Parce que M. Burkhalter représente le Bien. Et Ueli Maurer, le Mal. Le premier, on l’épargne. Le second, on le vilipende.

Peut-être le Gripen n’était-il pas l’avion adéquat. Peut-être aussi M. Maurer a-t-il raté sa campagne. C’est vrai qu’avant de choisir un avion, nous aurions bien voulu connaître, défendues avec clarté et conviction, la nature de l’ennemi potentiel, et les priorités de notre stratégie. Faute de ces prémisses, l’avion est apparu comme le joujou d’un lobby militaro-industriel éternellement gâté. Dont acte.

Mais alors, si l’on exige le départ d’un ministre ayant raté sa campagne, il fallait d’urgence, dès le soir du 9 février, demander la tête de M. Burkhalter. Dès son discours présidentiel du 1er janvier, il s’était engagé personnellement. Avec l’appui du patronat, il avait mis des moyens considérables. Et au final, il a perdu. Mais pour lui, silence et mansuétude. Parce qu’il incarne le camp du Bien.