Les Municipaux n’aiment pas parler 
des insultes dont ils font l’objet

VIE DÉMOCRATIQUE • Contactés individuellement pour savoir s’ils avaient fait l’objet de menaces et d’insultes, les municipaux lausannois ont préféré s’adonner à un exercice de langue de bois collective.

Si en politique, la collégialité demeure un pilier de notre fonctionnement démocratique, il peut arriver que parfois elle confine à l’absurde, si ce n’est au ridicule. On le sait, depuis l’avènement d’internet et des réseaux sociaux, le cyberespace est devenu propice à des dérapages quasi-institutionnalisés, donnant lieux à de permanentes menaces d’insultes.
Récemment, Lausanne Cités s’est fait écho de la plainte déposée par le journaliste star de la RTS Philippe Revaz qui a réussi à faire condamner un «courageux» qui s’en était pris à lui sur le web. Que dire encore de notre bonne vieille ville de Lausanne coutumière de certains excès, et où le mois dernier, le conseiller communale socialiste et coordinateur à l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) Samson Yémane recevait une lettre inqualifiable (voir encadré).
Durcissement
De fait, au vu du durcissement des modalités dans lesquelles le débat politique se déroule dans notre ville – un municipal ne s’est-il pas fait incidemment traiter de nazi par une conseillère communale? - il nous a semblé important de savoir si les municipaux lausannois, au vu de leurs éminentes responsabilités dans la cité, mais aussi de leur légitimité démocratique,  étaient épargnés ou au contraire victimes de ce type de pratiques détestables.
Lausanne Cités a donc adressé nominativement à chacun d’entre eux et elles un court questionnaire leur demandant non seulement de confirmer ou d’infirmer l’existence d’éventuelles menaces ou insultes, d’en donner éventuellement des exemples et surtout d’indiquer s’ils avaient jugé utile de porter plainte ou pas.
«Mêmes expériences»
De tout cela, ni Lausanne Cités ni les Lausannois ne sauront rien. Selon nos informations, ce sujet a été traité en séance de Municipalité et décision a été prise d’y donner une réponse collective et lénifiante, par la voix de la responsable de son bureau de la communication qui estime que les municipaux ayant été «confrontés plus ou moins aux mêmes expériences, il était donc plus efficient de faire une réponse commune».
Tout en concédant tout de même que «certaines fonctions au sein du collège municipal attisent plus de réactions que d’autres. La charge de la sécurité publique, aujourd’hui comme par le passé, expose notamment à des insultes ou menaces plus fréquentes. Cela étant, celles-ci sont le plus souvent anonymes.»

 

Les conseillers communaux sont devenus des cibles privilégiées

A Lausanne, les conseillers communaux sont souvent violemment pris à partie. Actif notamment dans l’aide aux réfugiés, le socialiste Samson Yémane d’origine érythréenne et coordinateur de l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés  a reçu récemment une missive dont l’auteur, anonyme bien évidemment, entend le «brûler comme au temps du Ku Klux Klan». Sur les réseaux sociaux, les attaques sont encore plus fréquentes et virulentes, les corbeaux ayant basculé depuis longtemps sur le numérique. Le conseiller communal socialiste Mountazar Jaffar, doctorant en sciences politiques à l’UNIL et  très engagé contre le racisme a fait l’objet d’innombrables messages haineux, dont ceux-ci: «si racisme veut dire renvoyez (sic) au bled les mecs comme toi, alors nous ne le sommes pas assez c’est un fait». «Dire que sans nous, il vivrait dans le désert, analphabète, gardien de chèvres et se nourrissant du dattier du coin».