Arnaque ou réelle nécessité?

- La hausse annoncée de la vignette autoroutière à 100 francs divise les partis politiques comme la population.
- Ses opposants parlent de tromperie, de désinformation et de faux espoirs suscités par la Confédération.
- Ses partisans évoquent quant à eux l'utilisation d'arguments tendancieux et mensongers.

  • Entre partisans et adversaires de l'augmentation de la vignette, le combat est acharné.

    Entre partisans et adversaires de l'augmentation de la vignette, le combat est acharné.

  • Entre partisans et adversaires de l'augmentation de la vignette, le combat est acharné.

    Entre partisans et adversaires de l'augmentation de la vignette, le combat est acharné.

La grogne est perceptible. Au comptoir des bistrots, à l'heure de l'apéro. Au moment de la traditionnelle causette du week-end, le samedi, à l'heure du marché. Ou encore dans le courrier des lecteurs de la plupart des journaux romands. Et la rengaine est presque toujours la même: «Encore une taxe injuste!» «On nous prend pour des pigeons!». «Soixante francs de plus d'un seul coup, c'est une arnaque. On n'a pas tous le salaire d'un Conseiller fédéral.» Et j'en passe...Simples propos de comptoir du commerce à prendre avec une certaine condescendance ou réel ras-le-bol lié à une nouvelle augmentation programmée? Dans tous les cas, la hausse prévue du prix de la vignette à 100 francs ne suscite pas que des passes d'armes dans les bistrots lausannois ou des coups de gueule dans la presse locale. Le sujet divise, transcende même les clivages politiques habituels et, au plus haut niveau de l'échiquier, les coups pleuvent également.

«C'est une arnaque destinée aux utilisateurs de transport individuel.» Claude-Alain Voiblet, vice-président de l'UDC

Une tromperie?

Pour preuve, les propos du président central du Touring Club Suisse (TCS), Peter Goetschi, le 22 octobre dernier, qui n'a pas hésité à accuser Doris Leuthard de «tromperie» sur le sujet, tout en déplorant «la désinformation systématique pratiquée par la Confédération.» La raison de cette colère? Les déclarations de la Conseillère fédérale comme quoi un non à cette hausse empêcherait la correction des deux grands goulets d'étranglement du réseau autoroutier que sont celui de Morges et du Glattal zurichois. Selon lui, pas un seul centime de l'augmentation n'ira à ces deux projets. «Ces deux réalisations, si un jour elles sont réellement entreprises, doivent passer par une augmentation de l'impôt sur les huiles minérales» martèle-t-il comme pour donner le ton à ses troupes.Le club des automobilistes s'est engagé à fond dans la campagne pour le non. Pour trois raisons: la hausse de la vignette ne va résoudre le problème de bouchons, elle sera utilisée pour l'entretien de quelque 400 kilomètres de routes déjà entretenues par les cantons, la caisse routière de la Confédération dispose d'une réserve de quelque 3,8 milliards. Avec les recettes courantes, elle a largement de quoi financer ce qu'elle projette de faire.L'UDC a été le premier parti politique a lui emboîter le pas. Elle n'est pas en reste dans la diatribe. «C'est une arnaque destinée aux utilisateurs de transport individuel. On veut leur piquer de l'argent sans rien leur offrir en retour», résume Claude-Alain Voiblet, son vice-président et membre de la présidence du Comité référendaire «Non à la vignette autoroutière à 100 francs.» Celui qui est aussi conseiller communal lausannois estime par ailleurs qu'une augmentation de 150% de son prix d'un seul coup est une injure faite aux citoyens.Alliés de circonstance, les Verts, comme l'Association Transport et Environnement (ATE), ne veulent pas entendre non plus parler de cette augmentation. Pour des raisons qui leur sont propres: ils ne souhaitent pas une expansion des autoroutes et préfèrent un système de taxation lié à l'utilisation des véhicules plutôt qu'un prix unique attribué à chacun.

Un retard de 5 ans

À l'inverse, le PLR, le PDC, le PS, avec quelques voix discordantes, ou encore les organisations patronales se montrent favorables à la hausse envisagée. «Les arguments utilisés par le TCS sont tendancieux et mensongers», résume ainsi Patrick Eperon, spécialiste des transports au Centre patronal vaudois. Connu pour être un ardent défenseur de la cause des automobilistes, il se dit outré par sa position dans ce dossier et tient à démonter une à une ses affirmations.Pas un seul franc n'ira au détournement de Morges... «Faux! En soutenant l'initiative déposée récemment par le conseiller national Felix Müri qui demande la mise en vigueur de l'arrêté fédéral sur le réseau des routes nationales, le TCS a reconnu qu'il y avait un lien juridique entre l'augmentation de la vignette et l'adaptation du réseau routier». La réserve de 3,8 milliards à disposition est suffisante pour les travaux prévus... «Encore faux! Il y a une réserve, mais elle est de 2 milliards. C'est insuffisant. Les autres 1,8 milliard ont déjà été attribués, notamment pour régler les problèmes liés au trafic d'agglomération.»De toute façon, une hausse de la taxe sur l'essence va bientôt s'ajouter à celle de la vignette... «Etant donné les besoins d'infrastructures que nous avons aujourd'hui et la politique énergétique mise en place, elle aura lieu de toute façon. Dire oui à la vignette permettra de la lisser au minimum.»Et Patrick Eperon de mettre en garde les citoyens: «Si le non triomphe, on va prendre cinq ans de retard en matière d'infrastructure routière. Après les 15 ans perdus sous l'ère de Moritz Leuenberger, ça va faire beaucoup. Ce sera de toute façon insupportable pour l'économie comme pour les habitants de la région de Morges et tous ceux qui transitent quotidiennement sur l'axe Lausanne-Genève.»

«Les arguments utilisés par le TCS sont tendancieux et mensongers.» Patrick Eperon, Centre patronal vaudois