MÉTAMORPHOSE 2 - Les milieux sportifs inquiets

- Redimensionné il y a une année, le projet Métamorphose 2 suscite de l'inquiétude dans les milieux sportifs lausannois.
- Personne n’arrive à imaginer qu’une ville olympique comme Lausanne puisse, pour des raisons financières, renoncer aux installations sportives prévues.
- Le «wait and see» et la vigilance prévalent, tandis que la Municipalité, dont la crédibilité a été mise à mal sur le dossier, tient à rassurer. Charaf Abdessemed

  • Les milieux sportifs inquiets

    Les milieux sportifs inquiets

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le malaise est palpable. Fin octobre 2012, la Municipalité annonçait revoir à la baisse Métamorphose, le projet phare de la législature. Et pour les milieux sportifs lausannois, la pilule était amère. Du projet initial, visionnaire et grandiose, ne subsistait, pour des raisons financières, qu’un plan B, fondé sur une «relocalisation» des équipements sportifs: un stade de football à l’anglaise à la Tuilière, une piscine à Malley et un stade d’athlétisme à Coubertin. Les échéances, à l’horizon 2019-2020, laissaient espérer à Lausanne de se voir enfin dotée d’infrastructures dignes du 21ème siècle et, surtout, d’une ville de statut olympique.

Seulement voilà: douze mois après l’effet d’annonce, l’inquiétude s’empare des milieux sportifs lausannois, qui çà et là, laissent poindre un scepticisme désabusé. «Mis à part la piscine, dont le principe est bien consolidé, résume un spécialiste, c’est le flou. Alors je ne serai pas surpris qu’un jour ou l’autre, on nous refasse le même coup et qu’on nous dise que pour des raisons financières, Métamorphose est encore raboté. À son corps défendant, la Municipalité se concentrera sur le volet logement de Métamorphose et se rabattra pour le sport sur l’option d’un stade de la Pontaise rénové! Autrement dit, du réchauffé!»

Scepticisme
A l’origine de ce scepticisme, il y a bien sûr, la crise de crédibilité dont fait l’objet la Municipalité qui avait «vendu» Métamorphose, soumis à votation populaire, comme un projet d’envergure incontournable. L’état des comptes actuels de la Ville, qui ne lui permettraient plus de consentir les investissements massifs qu'il requiert, y est également pour quelque chose: ainsi, bien plus peuplée et très dynamique sur le plan économique, la ville de Zürich par exemple, vient en votation communale, de renoncer à la construction d’un deuxième stade. Et puis, il y a les échéances démocratiques, le renouvellement de la Municipalité prévu en 2016 pouvant rebattre les cartes en profondeur et sonner le glas de la nouvelle version de Métamorphose. Jacky Delapierre, patron d'Athletissima et Alain Joseph, boss du Lausanne Sport, deux figures emblématiques du sport lausannois, font pourtant preuve d’un optimisme prudent. « Il est trop tôt pour s’inquiéter et, pour ma part, je préfère jouer le jeu jusqu’au bout, déclare ainsi Jacky Delapierre. Évidemment, je reste vigilant, car je sais que les belles promesses rendent les fous joyeux. J’espère donc qu’après l’effet de manche du printemps dernier, les échéances vont se concrétiser».

«On a pu voir que les scénarios les plus invraisemblables sont toujours possibles, mais je veux tout de même avoir confiance »
Alain Joseph, président du FC Lausanne Sport.

Tout est possible
«Je ne peux pas m’imaginer qu’après le sketch de la votation populaire sur Métamorphose, après le sketch des Prés-de-Vidy, puis enfin le sketch de la Tuilière, il y ait un 4ème acte et qu’on nous annonce un jour qu'il n’y aura pas de stade, résume non sans ironie Alain Joseph. J’espère du fond du cœur que ce scénario ne se produira pas et que dans une ville de statut olympique, les autorités politiques présentes et à venir tiendront leurs engagements. On a pu voir que les scénarios les plus invraisemblables sont toujours possibles, mais je veux tout de même avoir confiance». En charge des Sports, le Municipal Vuilleumier tient à se montrer rassurant: «Je sais qu’il y a des doutes, mais sauf cataclysme, et bien sûr en fonction des discussions à venir au niveau du parlement, tous les projets seront lancés. Cette nouvelle version de Métamorphose tient la route sur le plan financier et sur le plan des échéances». Et d’ajouter: «Tout de même, si dans une ville comme Lausanne qui est candidate aux Jeux Olympiques de la jeunesse (en 2020, ndlr), on n’arrive pas à construire les installations prévues… Mais tout le monde doit prendre ses responsabilités». Axel Marion, l'un des tout premiers politiciens à avoir tiré la sonnette d’alarme sur la faisabilité de Métamorphose, se montre lui un peu plus circonspect. «Évidemment que les associations sportives ont le sentiment qu’on s’est moqué d’elles! En réalité, le volet sportif de Métamorphose est très fragile et, si on regarde le budget de la Ville tel qu’il a été présenté il y a 3 semaines, on a de quoi être inquiet, lance-t-il. Ceci d’autant qu’à l’inverse du projet de tram par exemple, Métamorphose n’a pas de participation de la Confédération. La Ville n’a donc pas de pression et je crains que pour finir Métamorphose ne végète jusqu’à la fin de la législature».

 

« Voir grand pour Lausanne »

CA • S'il est un observateur averti de la scène sportive lausannoise, c'est bien Georges-André Carrel, l'ancien responsable du service des sports de l'UNIL-EPFL, tout juste retraité (lire notre article dans l'édition du 24 octobre), et qui s'était beaucoup investi lors de la votation populaire sur Métamorphose, en 2009.«Au vu de ce qui s'est passé durant les années précédentes on peut être inquiet, bien sûr, à la fois pour le sport et pour la jeunesse lausannoise. Les problèmes économiques sont présents et on ne sait pas si les nouveaux chiffres sont crédibles. Mais ce qui me fait souci, c'est qu'au fond, le sport a basculé en priorité numéro 3 après les réalités économiques et politiques».Et d'ajouter: «Il faut rester pragmatique et se battre pour ce beau projet dont la ville a besoin. Il faut voir grand pour Lausanne et je ne pense pas seulement au monde de la compétition, car le FC Lausanne Sport finira certainement par avoir un très beau stade à la Tuilière. Je pense surtout aux centaines de jeunes qui auront besoin de s'entraîner dans les meilleures conditions possibles. Au fond, il faut réintégrer M. Tout le monde dans Métamorphose».